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Mariane
Livre blanc

« Produire plus de richesse » : la crise va-t-elle changer la logique pour concilier économie et écologie ?

Respectable Loge, Clarté, Orient de Paris, Région 11 Paris 1

Mots Clefs : CommunRessourcesRichesse

La pandémie redistribue les cartes

La crise sanitaire de la COVID-19 semble plus ou moins contrôlée, mais nous découvrons à peine les dommages de la crise économique. Le virus a réussi à affaiblir nos certitudes en moins de 2 mois, avec la mise en évidence de notre fragilité.

Une course est lancée pour savoir comment secourir l’économie. En cherchant à rattraper à tout prix le temps et surtout les points de PIB perdus. Les économistes trouvent la réponse dans une relance salvatrice construite sur la « production de plus de richesse ». La solution serait donc un retour « à la vie d’avant », en évacuant ses conséquences et ses maux issus de l’inégalité de répartition de la richesse. Ne pas tirer la leçon du coup de semonce de la pandémie reviendrait à considérer qu’il ne s’agirait que d’un problème ponctuel de santé publique. Mais force est de constater que le système génère une crise sociale, encore débutante, avec des tragédies humaines en cours et à venir.

Nous n’étions pas préparés à une situation inédite provoquée par un arrêt simultané de l’offre et de la demande, principe moteur de notre société de surconsommation. On a découvert un décalage entre l’économie et les besoins premiers de l’humain. Le confinement est venu installer un doute en révélant un nouvel enjeu primordial : comment nourrir la population et la soigner ? Comment vivre tout simplement ? Pendant le confinement, le calcul de productivité et le taux de croissance ont été remplacés par la question fondamentale de la subsistance de l’humain. Comment produire sans subsister d’abord ? Nous ne sommes plus dans une logique de performance. Les maux considérés « avant » comme des effets de bord du système, ont subitement concerné l’humanité. Nous sommes des humains égaux face au virus.

La production de richesse ne peut plus avoir le même sens, d’autres valeurs et d’autres métiers (souvent dits « non qualifiés ») sont à valoriser. Nous devons rechercher maintenant comment atténuer l’une des prochaines crises, la crise climatique, avec des conséquences humaines au moins aussi catastrophiques.

La nature assure la production de ressources nécessaires à la vie collective de tous les hommes. Constatons que notre subsistance dépend d’abord de la nature. L’homme et la nature sont interdépendants.

Peut-on continuer à faire un amalgame entre production et richesse ? La richesse d’une société peut-elle encore être représentée par le PIB, ou représente-t-il seulement une partie de cette richesse ? Le PIB est l’image d’une production démesurée, basée sur la création de besoins artificiels alors que certains manquent de l’essentiel, qui enrichit à court terme, mais entraîne une activité nuisible à notre environnement à plus long terme.

« Produire plus de richesse » au sens d’avant conduirait à renforcer le productivisme et la surconsommation conséquente, qui, associés à notre dépendance excessive à l’hyper-mobilité et à la mondialisation, ont des conséquences environnementales et climatiques désastreuses : épuisement des ressources naturelles, déforestation, pollutions, évènements météorologiques extrêmes, élévation du niveau des océans, … Des désordres aux conséquences désastreuses pour l’homme en provoquant la migration de populations avec ses tragédies. Ajoutons qu’au coût écologique de l’exploitation des ressources s’ajoute le coût humain (on peut citer en exemple l’extraction du cobalt en Afrique (en RDC) avec le non-respect des droits humains, le travail des enfants, la violence).

Il ne s’agit pas de remettre en cause la liberté d’exercer une activité de production ou le droit des pays pauvres à se développer, mais de constater que les pays dits riches sont responsables de la surexploitation des ressources et de l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre. Il s’agit de distinguer la production en tant qu’objectif dominant tous les autres par une exploitation excessive ou illégitime des ressources, et une production du nécessaire, plus rationnelle et plus raisonnée.

Contrairement à la crise sanitaire que nous n’avons pas vu arriver, pour la crise climatique nous sommes avertis. Le changement climatique est déjà là et produit des effets réels partout dans le monde. Il n’est plus possible de continuer à détruire notre patrimoine naturel, de reporter la mise en œuvre de moyens de le préserver au nom des rivalités de puissance privée ou étatique, en prenant le risque de mettre l’humanité et les autres espèces en péril.

L’occasion nous est donnée d’inverser la logique

La logique « d’avant » peut être inversée, en produisant de la richesse pour préserver notre patrimoine naturel, mais ne plus devoir dépenser pour réparer.

Développer massivement les filières du recyclage constitue une vraie réponse aux contraintes environnementales et économiques. Le recyclage diminue considérablement l’émission de gaz à effet de serre, et contribue à l’économie de matières non renouvelables. Avec des produits recyclés aux coûts réduits qui pèsent moins sur le pouvoir d’achat des plus modestes.

Pour contraindre les industriels à concevoir des produits écoresponsables, le changement peut s’imposer « par le bas » en adaptant notre mode de consommation, en adoptant les gestes barrières face à une publicité omniprésente qui doit être réorientée au profit des produits les plus vertueux. Comme le propose la convention citoyenne pour le climat, elle doit poser la question « En avez-vous vraiment besoin ? « . Pour réapprendre à consommer, le système éducatif doit jouer un rôle dans un plan de conduite du changement à activer pour rendre durable le développement humain.

Impliquer plus largement les scientifiques peut éviter de laisser le seul point de vue productiviste dominer, au détriment de l’amélioration matérielle et morale, du perfectionnement intellectuel et social de l’humanité. Un système égalitaire ne peut être à 2 vitesses, pourquoi permettre aux plus riches d’acheter le droit d’émettre plus de gaz à effet de serre ?

La pandémie redistribue les cartes. Elle nous interroge sur le sens de «produire plus de richesse ». La nature et ses ressources paraissaient infinies. L’épisode du confinement nous a sans doute permis d’acquérir une conscience globale. La nature considérée comme un bien commun pose la question de la gouvernance qui peut prendre du temps. Mais en attendant des accords à différents niveaux (national ou international), l’occasion nous est donnée d’inverser la logique.

La crise doit être l’occasion de réévaluer les modèles de production et de consommation, destructeurs de ressources et du climat. Ils coûtent cher à la planète et à l’humanité. La solidarité avec les générations actuelles et futures, c’est l’enjeu de la préservation de notre cadre vital.

Et comment ne pas associer à la remise en cause actuelle, la réflexion sur le revenu universel inconditionnel, revenu de subsistance par essence, avec une notion de consommation écoresponsable ?

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