Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

Regards croisés et fraternels sur le confinement,

Respectable Loge, Les Amis des Hommes, Orient de Lyon, Région 6 Est et Loges de Suisse

Mots Clefs : ChaosFailliteOptimismePeurUtopies

Récits de vie confinée

Nous évoquons notre quotidien à l’épreuve du confinement. Il est vécu différemment selon la tranche d’âge, les responsabilités familiales, l’habitat, les difficultés personnelles et/ou familiales. La constante reste le regard que nous portons sur nos façons d’être et de vivre que nous voudrions empreintes des vertus de la F.M. Une volonté d’amélioration personnelle peut poindre. Nous acceptons d’être surpris pour l’un par une activité professionnelle en hausse, pour l’autre par la découverte d’une qualité personnelle, par notre capacité d’adaptation, devant nos sens réveillés par le zonzonnement des insectes, les chants des oiseaux, un air fin à respirer. Nous abordons la liberté personnelle, je dirais même intime. Celle qui laisse nos pensées vagabonder, ou être dirigées par nous-même, celle qui oriente nos choix et qui nous permet de vivre. Cette liberté n’est pas entachée par le confinement. Le manque de liberté collective est plus difficile à vivre bien qu’il y ait une raison primordiale à cela. Le collectif nous fait aborder les difficultés économiques et sociales en lien avec le confinement. La situation déjà délicate risque d’empirer après le déconfinement, avec des mouvements sociaux qui seront sans doute encore plus violents.

Sachants, croyants, experts, parieurs, à quelle vérité se fier ?

A quelle vérité se fier ?

Le constat du chaos

Notre premier constat est celui de l’état chaotique de la société confrontée à un nouveau virus :

La surabondance de données, de positions, d’avis et de décisions, entretient la confusion des vérités et des non-vérités.

La méfiance vis-à-vis des discours officiels, quels qu’ils soient, dilue le lien social.

La faillite des « sachants » et des représentants de la société, faillite à la fois intellectuelle et morale, accentue cette méfiance.

La plongée dans une crise économique met en danger l’avenir immédiat.

Le renversement des valeurs, phénomène caractéristique des crises majeures révèle les dysfonctionnements des politiques publiques successives.

Pour tout cela, la crise sanitaire intervient sur un « pays en colère ».

Nous rappelons qu’il appartient au « Politique » d’effectuer autant qu’il est possible la synthèse des connaissances utiles, de hiérarchiser les différents plans du sujet lorsque c’est le cas, et enfin de décider et de donner les directives voire les ordres, investi des pouvoirs du peuple qu’il représente, pour le bien de la Nation. La critique de cette action appartient au champ de la démocratie.

Face à cette situation, deux positions émergent :

La première considère que nous avons moins besoin de « sachants » et de « croyants » que d’interprètes pour nous expliquer la situation, mais aussi pour interpréter ce que nous imaginons pour l’avenir.

La seconde estime que nous n’avons pas à être dans l’attente des autres, d’un discours vertical, pour engager des actions. Il faut aller vers une phase d’individuation pour faire des choix.

Enfin un rappel : C’est dans ce contexte-là, fou, irrationnel et anxiogène que les vertus maçonniques trouvent toutes leur sens : des vertus de silence, bien entendu, mais aussi d’humilité. Accepter qu’en ces temps incertains, on ne sache rien, sinon pas grand-chose, accepter l’incertitude, et profiter du moment pour se recentrer, travailler sur la pierre brute, lire, écouter plutôt qu’entendre, analyser, mais aussi expérimenter un nouveau rapport au temps.

Alerte tous azimuts

La présence de la peur nous semble évidente dans la situation actuelle. Hobbes avait théorisé le lien entre la peur et le pouvoir, et l’ombre portée de la peur dans cette crise fait sonner tous les signaux d’alerte.

S’y ajoute une « illusion biopolitique » : les autorités ont improvisé et imposé une théorie du confinement qui est loin d’être fondée sur une preuve épidémiologique. De fait, il apparait évident que le maintien de l’ordre est la priorité absolue.

Pour l’heure, la situation nous semble être au stade du dégoût, généré par la perte de confiance évoquée plus haut. Notre crainte est de passer du dégoût à la honte, de la honte à la colère, de la colère à la haine, et d’en arriver à la recherche du bouc-émissaire. Et nous ajoutons : « si la faim s’en mêle, là ce sera le grand soir ».

Or la faim est déjà là, les problèmes d’alimentation touchent déjà les plus pauvres et les plus fragiles, les invisibles, les précaires, les populations déjà en marge.

Par ailleurs, les libertés individuelles, la Liberté, sont menacées directement.

Plus largement, le recours à la technologie et à l’Intelligence Artificielle semble être une piste séduisante pour des sociétés qui se sont déjà engagées dans le développement de l’IA. Or elle est maîtrisée non pas par le monde politique –contrôlé dans les sociétés démocratiques- mais par le monde marchand, qui lui agit sans contrôle. Le danger est donc de voir s’imposer l’intérêt particulier sur l’intérêt général.

Peur, maintien de l’ordre, intérêts particuliers dominants ensemble forment un cocktail explosif pour la démocratie.

Des raisons d’espérer

Face à la crise, l’optimisme est aussi un chemin de pensée et d’action. Nous avons abordé la question de la responsabilité des médias dans la vision que la société a d’elle-même à un instant T. Il y a en ce domaine une demande accrue d’information sourcée, expliquée, contextualisée, précise, donc moins instantanée, moins superficielle. Cela renvoie au premier point du constat de chaos sur la surabondance de données.

C’est aussi l’action locale qui impose son tempo à la lutte contre le virus, et non plus seulement les discours officiels et verticaux. L’initiative locale restaure l’intelligence collective. La remise en cause des schémas mentaux et institutionnels permet d’imaginer d’autres schémas et d’autres avenirs.

Dans ce contexte, de nouvelles « grosses utopies » redeviennent pensables.

Notre discussion nous conduit à la description d’une situation « pré-révolutionnaire », qui génère craintes et espoirs. Parmi les craintes, le glissement vers une « République des Experts » dénuée de légitimité démocratique, soumise aux dogmes dominants notamment celui de la technologie reine. Parmi les espoirs, la notion d’un monde « en métamorphose » qui fait plus appel à l’intelligence collective pour inventer la suite de cette situation inédite.

Nous rappelons cependant que :

La nécessité de l’heure demeure l’action solidaire.

La réflexion utopique est plus que jamais nécessaire.

L’une doit s’appuyer sur l’autre pour tirer tout le parti des possibles afin qu’effectivement un progrès émerge du chaos.

Face à une situation chaotique, voire pré révolutionnaire, nous devons nous appuyer sur les vertus maçonniques que sont l’humilité, la sagesse et l’analyse raisonnée pour développer un nouveau rapport au temps, retourner dans la société en agissant localement et imaginer de nouvelles utopies à proposer aux générations montantes.

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