Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

Crises, Démocratie et Libertés

Respectable Loge, La Défense Maçonnique, Orient de Paris, Région 11 Paris 1

Mots Clefs : ContrôleCriseDémocratieLibertéPouvoirs

Bien que la réponse la plus évidente paraisse être « oui », une situation de crise dans une société démocratique justifie une restriction des libertés, elle se module au fil des réflexions.

Une situation de crise justifie-t-elle une restriction des libertés

La réponse la plus évidente parait être « oui » : une situation de crise dans une société démocratique justifie une restriction des libertés. Cette réponse se module cependant au fil des réflexions.

Dans un premier temps, il faut définir ce qu’on appelle « crise », sur quels critères, qui décide qu’il y a crise et les arguments avancés. Une crise se détermine au regard de la norme. Toutefois les normes évoluent et ne se réfèrent qu’à ceux-là mêmes qui les définissent.

Une analyse nécessairement complexe de la crise en elle-même peut justifier une restriction des libertés, ainsi que sa gestion sur les terrains scientifiques, économiques, environnementaux… Il s’agit d’élaborer notamment des réponses dont on devra être en mesure d’anticiper les conséquences une fois la crise passée.

Une crise peut en entraîner une autre et c’est ce qu’il faut limiter à tout prix. La crise peut être révélatrice de problèmes sous-jacents non révélés. Une crise ne peut être décrétée afin de masquer d’autres crises.

N’oublions pas que dès lors qu’on fait croire à quelqu’un qu’il est en danger de mort, on en fait ce qu’on veut.

Les pouvoirs publics ont pour mission première de protéger les citoyens contre toutes les atteintes. Pour ce faire ils se doivent de mettre en œuvre TOUTES les mesures destinées à assurer cette protection.

Si pour ce faire il est nécessaire de limiter les libertés fondamentales de circuler, de se réunir, ces limitations sont légitimes dès lors qu’elles sont expliquées aux Citoyens et à la représentation nationale (Parlement) dont le rôle est, si nécessaire, d’en encadrer la mise en œuvre en termes de délais et de renouvellement.

Ces mesures restrictives de liberté doivent toujours être justifiées dans leur intensité et dans leur durée. Elles doivent être proportionnées aux risques encourus en situation de crise.

Les mesures privatives de liberté individuelle doivent être validées, justifiées par des avis et des consultations d’experts, le pouvoir exécutif ne pouvant décider seul de mesures privatives des libertés.

Un citoyen doit pouvoir jouir de la plénitude de ses libertés individuelles pour autant qu’il ne porte aucunement atteinte aux libertés, à la sécurité et aux intérêts individuels des autres membres de la communauté.

Un Etat démocratique est celui qui ne limite la liberté des uns que pour protéger les autres.

Quelles limites à la restriction des libertés individuelles et collectives ?

Le peuple délègue le pouvoir et la responsabilité aux gouvernants.

Ceux-ci doivent s’entourer d’experts, de conseils dans les domaines pour lesquels ils n’ont pas la compétence, afin de prendre les décisions les plus adéquates de gestion des crises, d’autant plus si ils ne les ont pas anticipées. Ces décisions, ratifiées par décret, se doivent d’être respectées.

Les pouvoirs publics ont un devoir d’information vis-à-vis de la population. Une information qui doit être honnête et exempte de tout conflit d’intérêt. Il s’agit de ne pas dire tout et son contraire. Il est nécessaire de reconnaître si besoin les manquements de l’action publique.

La parole officielle et politique ne doit pas être confuse et les décisions prises remises en cause dans les jours suivants. Cela ne contribue pas, bien au contraire, au respect des mesures imposées.

Partons du postulat qu’il n’y a pas de domaines dans lesquels la liberté est absolue. Mais, est-il justifié de censurer la liberté d’expression, de restreindre la liberté de déplacement, de travailler, sans qu’un lien ait été clairement établi entre la restriction de liberté et les risques encourus, au risque de générer sinon d’autres motifs de crise (sanitaire, économique …).

L’état d’urgence ne doit pas empêcher les contrôles de l’action publique. Un contrôle impartial doit être maintenu sur les décisions de l’exécutif, afin d’évaluer les mesures et leurs conséquences, et éviter ainsi une approche totalitaire de la gestion des crises, une privation des libertés absolue et autoritaire.

Le conseil constitutionnel doit être saisi pour vérifier la conformité des mesures décidées avec la constitution. Le juge administratif doit pouvoir contrôler les décisions et être saisi afin d’éviter les dérives. Les juges administratifs et le conseil constitutionnel peuvent invalider les décisions prises si elles sont abusives.

Une situation de crise ne peut pas justifier l’abolition de l’Etat de droit.

L’adhésion des populations doit être suscitée au regard des restrictions des libertés. Une information objective, transparente, complète et réitérée doit permettre de donner l’assurance que les mesures prises sont appropriée à la situation de crise.

Les mesures doivent être perçues comme proportionnelles aux représentations individuelles et collectives de la crise. L’application des mêmes règles à tout le territoire et/ou toute la population peut paraître disproportionnée voire inadaptée si la crise le/la/les touche de manière différenciée. Certaines discriminations peuvent paraître justifiées en fonction du degré d’exposition des territoires et des populations aux risques.

Un appel à la responsabilité collective et individuelle serait-il un mode plus approprié de résolution des crises ?

Avant d’envisager des restrictions trop draconiennes, il faut faire appel à l’intelligence collective et individuelle par la communication et la prévention afin que chacun prenne les mesures qui s’imposent pour ne pas mettre les autres en danger.

Des mesures imposées, non comprises, peuvent être pires que le mal. Il faut éviter d’infantiliser, culpabiliser et stigmatiser la population ou une partie de la population.

Il s’agit de respecter le principe démocratique de la plus grande liberté possible et d’intervenir par voie de recommandations plutôt que d’interdictions dans la mesure où l’information est claire, argumentée et ne change pas d’un jour sur l’autre, sinon cela ne fonctionne pas. Le bon sens n’est pas inné pour tout le monde.

Reconnaître l’intelligence individuelle et collective octroie à chacun la liberté de choisir son existence.

Les décisions arrêtées en situation de crise sont souvent politiques voire économiques et insuffisamment fondées sur des critères scientifiques.

Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités, le pouvoir exécutif peut être donc tenté de prendre les mesures les plus restrictives qui soient afin de limiter au maximum les risques. Le principe de précaution s’applique dans les situations incertaines.

Les mesures restrictives des libertés doivent être justifiées pour être acceptées, sinon elles deviennent inefficaces.

Dans la gestion des crises, il est essentiel enfin d’anticiper l’impact que peuvent avoir les restrictions des libertés sur la santé mentale et le bien-être des personnes : suicides, dépressions, faillites, paupérisation.

Il s’agit de considérer non seulement les besoins primaires (nourriture, hébergement …), mais aussi les besoins secondaires nécessaires à l’équilibre des personnes (relations avec les autres, accès à l’éducation et à la culture, estime de soi …).

La gestion des crises et la restriction des libertés doivent privilégier dans les sociétés démocratiques la recherche d’un consensus entre pouvoirs publics et citoyens responsables.

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