Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

Comment respecter le principe de laïcité dans les actions de santé publique et de prévention, avec leurs corollaires social, psychologique et socio-médical ?

Respectable Loge, Intersection, Orient de Paris, Région 12 Paris 2

Mots Clefs : ConfinementCroyances et pratiques religieusesÉthique de responsabilitéLaïcité

Problématique et enjeu  

   La pandémie du coronavirus a nécessité la mise en place de mesures visant à réduire la transmission du virus. Parmi ces mesures, le confinement, la restriction des capacités de réunion, la fermeture des lieux de culte ont pour les citoyens entravés de façon significative l’exercice de leurs pratiques religieuses. Cette épidémie met ainsi en exergue les tensions éthiques, philosophiques et scientifiques que peuvent générer d’un côté les politiques de santé publique, et de l’autre le respect du principe de laïcité. 

   De quelle manière revisiter les croyances individuelles pour passer à une éthique de responsabilité ? Tel est l’enjeu des politiques de santé publique dans un futur proche.

Analyse actualisée de la situation

   Historiquement, il y a toujours existé des liens étroits entre la santé, les croyances et les pratiques religieuses. On peut même avancer l’idée que la sécularisation postrévolutionnaire du système de santé s’est accomplie très tardivement comparativement à l’enseignement ou à l’état civil. Longtemps des lieux de soins (hôpitaux) ont fonctionné grâce à du personnel paramédical religieux (religieuses infirmières). Les lieux de pèlerinage (comme celui de Lourdes) témoignent de la persistance de la fonction thérapeutique des croyances religieuses.

   Les pratiques religieuses peuvent être favorables pour la santé :  interdiction de la prise d’alcool dans la religion musulmane ; interdiction de la consommation de viande de porc source d’infections parasitaires. Des travaux plus récents, soulignent le rôle de la spiritualité (religieuse ou non religieuse) dans la prévention et la prise en charge des conduites suicidaires et des troubles psychiatriques. Les pratiques méditatives et de pleine conscience inspirées du bouddhisme diminuent le risque de récidive de dépression. Les communautés religieuses apportent également un soutien moral et un réseau social aux patients.

   Mais les pratiques cultuelles peuvent aussi s’avérer nocives pour la santé comme l’interdiction du préservatif pour la prévention des infections VIH ; la question du refus des vaccins ou des transfusions pour les témoins de Jéhovah. Ces pratiques peuvent gêner également l’exercice de la médecine (interdiction d’un examen gynécologique d’une femme musulmane par un médecin homme).  

   La Santé publique a pour objectif de prévenir des maladies et de promouvoir la santé conçue comme un bien-être social, physique et mental. Elle définit sur des bases scientifiques les déterminants biologiques, génétiques, psychologiques, sociaux et environnementaux de la santé et des maladies.  

   En France par une vision rationaliste et scientifique issue de la révolution et par respect du principe de laïcité (liberté de conscience, neutralité de l’espace public, séparation de l’église et de l’État), il est peu, voire pas pris en compte les déterminants religieux dans les comportements de santé.

   La santé publique vise à changer les comportements. Les croyances, définies comme un état mental constitué par une relation à un contenu propositionnel – ‘Je’ (sujet) ‘suspecte’ (attitude) ‘mon voisin d’être contagieux’ (proposition) – sont les déterminants majeurs des comportements. Les croyances sont des modèles statistiques du monde qui définissent les perceptions et guident nos actions. Les travaux en sciences cognitives ont montré que l’adhésion à une croyance peut être variable et susceptible de révision en fonction des informations perçues et des évolutions de la réalité.

   In fine la cible des actions de santé publique est donc de revisiter les croyances des individus (ex. les vaccins de l’hépatite B n’entrainent pas de sclérose en plaques) afin de favoriser l’émergence de comportements favorables pour la santé. Le conflit entre le respect du principe de laïcité et la santé publique est donc un conflit de croyance. S’ajoute finalement à ce conflit, un problème éthique et l’on a bien vu que l’épidémie de coronavirus a opposé à l’éthique de conviction à l’éthique de responsabilité (risque de diffusion de la maladie lors des rassemblements religieux).

Les actions concrètes

   Réaffirmer les principes de laïcité (pas de distinction des religions – contre-exemple de la réouverture des églises à la pentecôte sans mesure identique pour les musulmans)

   Définir les risques sanitaires futurs qui ne se limitent pas aux risques infectieux mais doivent en prendre en compte les risques environnementaux (ex. perturbateurs endocriniens)

   Améliorer la connaissance philosophique et cognitive sur les notions de croyances et leurs rôles dans les comportements de santé

   Promouvoir les sciences humaines et sociales dans la formation des médecins et des acteurs de santé publique. Actuellement la santé publique limite l’homme à son bios. La santé publique devrait promouvoir la différence entre l’existence et la vie.

   Dans une vision plus inclusive de la laïcité, intégrer l’analyse des croyances religieuses sur les comportements favorables à la santé, ce qui facilitera la mise en place de mesures proportionnelles

   Développer l’éducation à la santé et aux comportements de santé publique à l’école de la république.

Proposition phare : promouvoir les sciences humaines et sociales dans la formation des médecins et des acteurs de santé publique.

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