Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

Le maillage de notre territoire, notamment des services publics, est-il pertinent ?

Respectable Loge, Intersection, Orient de Paris, Région 12 Paris 2

Mots Clefs : CentralisationDécentralisation rationaliséeMaillage territorialQuestion environnementaleResserrer le réseau des services publicsSolidarité internationale

Problématique en jeu

   La notion de maillage de notre territoire ne saurait renvoyer à la seule question, certes importante, de l’inégale accessibilité des services publics dans les différents territoires de la République. Le « maillage » territorial – c’est-à-dire littéralement l’action de former un réseau – constitue une grille d’analyse pertinente pour aborder d’autres enjeux tout aussi majeurs pour la cohésion socio-territoriale de notre pays : la question du bon échelon de décision, celle de la coopération entre État et collectivités locales, celle de la différenciation territoriale, celle du rapport entre centres et périphéries, ou encore celle du rapport entre le local et le global.

   La crise sanitaire que nous venons de traverser réactualise ces questions. La sortie de crise peut être l’opportunité d’y apporter des réponses.

Analyse actualisée de la situation : la crise a révélé les ambivalences du rapport de notre pays à ses territoires

   À de nombreux égards, la crise sanitaire nous permet de renouveler des constats anciens.

   En premier lieu, la tension française entre tradition centraliste et poussées décentralisatrices a été réanimée à la faveur des décisions gouvernementales de confinement puis de déconfinement de la population. La prise de décision s’est révélée très pyramidale et centralisée dans un premier temps, avec un discours martial et une incarnation personnelle du pouvoir par le président de la République et le Premier ministre. Cependant, dans un second temps, les régions, les départements et le bloc communal ont fait entendre leur voix, et sont parvenus à la fois à infléchir des décisions et à peser dans la mise en œuvre des mesures prises.

   En second lieu, l’approche « unitaire » du territoire, consubstantielle à notre conception républicaine de la nation, s’est illustrée de façon éclatante. Les mesures prises ont été, jusqu’à l’instauration des zones rouges et vertes, appliquées de façon indifférenciée dans l’ensemble du territoire national. La polémique sur la fermeture des plages a été une illustration des tensions entre aspirations locales à retrouver la liberté et précautions gouvernementales.

   En troisième lieu, les rapports de force entre Paris et les métropoles régionales ainsi qu’entre les zones urbaines et les zones périphériques (périurbaines et rurales), déjà largement exprimés par les Gilets Jaunes, se sont illustrés par les nombreux épisodes de défiance vis-à-vis de Parisiens venus se confiner dans divers lieux de villégiature en province. Le rapport de force traditionnellement favorable à la capitale s’est – chose remarquable – inversé en fin de confinement : Paris n’était plus « une fête », quand d’autres territoires retrouvaient le goût de la vie.

   Surtout, la question des inégalités territoriales s’est posée en des termes nouveaux à la faveur de cette crise.

– On sait que la mobilité géographique et résidentielle est le premier vecteur de mobilité sociale. Les inégalités socio-territoriales dans notre pays viennent, pour une large part, des inégalités face aux mobilités. Or, le confinement, en interdisant à tout le monde toute mobilité, a en quelque sorte égaliser les conditions de tous à cet égard ; 

– Les zones les plus dépourvues en services publics de santé (principalement les zones rurales) ont été en grande partie épargnée par l’épidémie virale. C’est une chance qui ne doit cependant pas occulter la réalité et la permanence de cette inégalité territoriale préoccupante ;

– Les inégalités socio-territoriales se sont surtout illustrées, dans cette période, en matière d’éducation. Le confinement ayant généré des milliers de décrochages d’élèves, il n’a pu qu’accentuer les inquiétudes préexistantes sur les inégalités scolaires dans notre pays.Plus largement, il s’agit là nouvelle illustration de la fracture numérique, avec l’impossibilité d’accéder à des activités en ligne (télétravail, services en ligne, école à la maison, exercices physiques et loisirs) pour les ménages non équipés de matériel et de connexions ;

– La surreprésentation des ouvriers, employés et « Uber-travailleurs » est enfin un facteur de fragilité accru dans certains territoires dont les quartiers prioritaires. L’activité de ces travailleurs, souvent à temps partiel et précaires, s’est pourtant manifestée comme essentielle à la vie du pays.

   Enfin, l’épidémie est considérée par de nombreux Français comme un symptôme d’une mondialisation non-maitrisée. Il est fort possible que cette crise soit l’occasion d’un retour au local et d’un regain de la prise de conscience environnementale, aux différents niveaux territoriaux (en témoignent les achats massifs de vélo lors du confinement des grandes villes). 

Les actions concrètes pour rééquilibrer les relations entre les territoires et réduire les inégalités socio-territoriales à la faveur de la sortie de crise 

   « Mieux d’État » et une décentralisation rationalisée.  La crise sanitaire que nous avons traversée peut- être l’occasion de réinterroger la place de l’État dans notre pays. Il semble dès lors urgent de renforcer et recentrer l’action de l’État sur ses fonctions essentielles, notamment régaliennes. Si toute tentation fédéraliste semble être en profonde contradiction avec l’histoire et les aspirations de la République, la revitalisation d’un « État stratège » passera par une redéfinition des modalités de la décentralisation et des responsabilités de chacun des acteurs, afin d’éviter les doublons de compétences entre les différents échelons. Si le rôle primordial pour les citoyens du bloc communal doit être reconnu, une remise en question de la clause de compétence générale des départements et régions pourrait être salutaire, tout en promouvant la possibilité d’une différenciation territoriale sur cette question.

   Profiter de l’acte iii du quinquennat pour resserrer le réseau des services publics. L’initiative France Services, excellente réponse à l’enjeu d’accessibilité des services dans les zones rurales et les quartiers difficiles, doit être pérennisée. Il pourrait en outre être décidé d’interrompre sur tout le territoire national la suppression de toute implantation locale d’un service public, tant que le parachèvement des réseaux de substitution et la résorption de la fracture numérique ne seront pas acquis. Il pourrait également être inscrit dans la loi le principe selon lequel les fermetures d’écoles rurales ne sauraient être guidées par d’autres intérêts que l’amélioration de l’accès à l’Éducation.

   Approfondir la solidarité interterritoriale. Le 1 % métropole, proposé en 2017 par l’Association des petites villes de France, consisterait à reverser un centième des produits fiscaux des métropoles au profit de leurs territoires périphériques pour financer des projets structurants et accélérer ainsi la convergence des bassins de vie. Dans la même approche, les contrats de réciprocité, qui peuvent exister çà et là, devraient être généralisés.

   Saisir l’opportunité… Elle est offerte par le contexte actuel d’investir pleinement la question environnementale dans les territoires, avec comme boussole l’idée de résilience territoriale, en s’appuyant sur la forte aspiration des citoyens à une participation plus directe dans le processus démocratique, indissociable d’une responsabilité accrue. Les nouveaux outils numériques y aideront.

Proposition phare : approfondir la solidarité interterritoriale avec le 1 % métropole.

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