Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

L’Éducation

Respectable Loge, Thélème, Orient de Paris, Région 14 Paris 4 et Loges d'Europe de l'Est

Mots Clefs : Pacte républicain

Définissons tout d’abord les termes de ce thème ; à cet égard il convient de souligner que nous sommes face à deux notions proches et pourtant distinctes : éducation et enseignement.

L’éducation, c’est développer, produire, apprendre. C’est le développement des facultés intellectuelles morales et physiques d’une personne sur des plans variés : moral, social, religieux technique, scientifique, médical etc.

Il est possible de distinguer quatre grands domaines éducatifs :

  • le savoir, qui consiste en l’acquisition des connaissances intellectuelles
  • le savoir-faire, qui englobe l’acquisition de compétences pratiques
  • l’être, qui regroupe la connaissance psychique et biologique d’un individu
  • le savoir-être, enfin, qui désigne la capacité de produire des actions et réactions adaptées à la société humaine et à l’environnement

Quant à l’enseignement, c’est précisément la mise en œuvre, par un enseignant, de la transmission des compétences décrites ci-dessus. Enseigner ne s’improvise pas, c’est une activité qui requiert formation et expérience. Il couvre deux champs : la gestion de l’information, la structuration du savoir par l’enseignant d’une part, et leur appropriation par l’élève d’autre part.

On peut donc dire que l’enseignement est une composante de l’Éducation.

Plus largement, le rôle de la famille est essentiel pour l’apprentissage des savoir-faire, qu’il s’agisse des plus élémentaires comme des plus complexes. Pour cela, il faut associer l’enfant aux travaux et à la vie des adultes.

Qu’en est-il au niveau sociétal ?

Durkheim définit l’éducation comme visant à « susciter et développer chez l’enfant un certain nombre d’états physiques, intellectuels et moraux que réclame de lui et la société politique dans son ensemble et le milieu spécial auquel il est particulièrement destiné ».

L’école a donc un rôle de socialisation. Par l’éducation physique (maîtrise du corps), par les apprentissages pratiques (maîtrise des techniques) et intellectuels (maîtrise des connaissances), elle contribue à réaliser la socialisation des enfants et à permettra l’apprentissage de la citoyenneté, de même qu’elle participe activement au développement de l’économie, par la formation générale comme par la formation professionnelle et par la transmission des connaissances scientifiques et des techniques.

Cela étant, un constat s’impose : l’école de la République se moins rapidement que la société dans laquelle elle évolue. Le système éducatif au sens large est donc à réinventer en permanence, qu’il s’agisse d’éducation scolaire, périscolaire ou postscolaire, de l’enfant comme de l’adulte. C’est une condition indispensable si l’on veut maintenir une adéquation entre la société et les citoyens.

La crise sanitaire que nous traversons encore est riche d’enseignements.

Tout d’abord, le rôle des parents demeure fondamental. En l’espèce, on constate un écart croissant entre les milieux favorisés et les autres.

Évidemment, les enseignants sont très importants. Ils ont été, pour la grande majorité d’entre eux, exemplaires. Ils se sont montrés force de propositions et ont su concrétiser un engagement solide auprès de leurs élèves.

C’est d’autant plus remarquable que les enseignants ne jouissent plus aujourd’hui d’un statut valorisé, qu’ils doivent faire face à des situations de plus en plus variées et complexes et qu’ils ne bénéficient pas toujours du soutien véritable de leur hiérarchie. Cette relative déconsidération se traduit notamment dans les salaires : le rapport de l’OCDE « Regards sur l’éducation » pour l’année 2019 sur l’éducation montre que les enseignants français, et en particulier ceux du primaire, touchent des salaires médiocres en comparaison avec leurs homologues des pays développés. Selon ce rapport, le salaire des professeurs français est inférieur de 7% à la moyenne des pays de l’OCD. À titre d’exemple, après quinze ans de carrière, un enseignant français en école primaire gagne 37700 dollars bruts, soit 34140 euros par an. Son homologue allemand gagne pratiquement le double avec un revenu annuel brut de 74486 dollars, soit 67450 euros. Notons au passage que cette étude de l’OCDE contredit à certain lieu commun en particulier ceux qui concernent le temps de travail des enseignants. En primaire, les instituteurs français travaillent 900 heures par an alors que la moyenne de l’OCDE est de 794 heures. En résumé, les enseignants français travaillent plus que la moyenne et sont payés significativement moins. Ces chiffres illustrent une réalité simple qui constitue aussi une erreur collective stratégique : en France, l’éducation est considérée comme un coût qu’il faut limiter et non comme un investissement qu’il faut encourager et maximiser. La question à laquelle il faut répondre est la suivante : pour relever les défis à venir, mise-t-on sur l’école ou non ? Pendant la campagne pour l’élection présidentielle de 2017, le candidat Emmanuel Macron avait affirmé sa volonté de réduire les inégalités « à la racine » en faisant porter ses efforts sur l’école primaire. Une de ses promesses consistait notamment à diviser par deux les effectifs en CP et CE1 pour les établissements situés en zone REP (Réseau d’Éducation Prioritaire) et REP+. Force est de constater que cette promesse a été assez largement tenue. Mais force est de constater que cela ne s’est accompagné d’aucune revalorisation salariale. Pourtant, ce ne semble pas être une question de moyens. En euros constant, le budget alloué à l’éducation a en effet régulièrement augmenté entre 1980 et 2015, que ce soit en valeur absolue ou rapporté au nombre d’élèves. En 2021, il reste le le premier de l’État : le projet de loi de finances pour l’année 2021 fait état, pour le Ministère de l’Education Nationale de la Jeunesse et des sports d’un budget de 55,1 milliards (53,6 milliards seront consacrés à l’éducation, 699 millions à la jeunesse et à la vie associative et 802 millions aux sports) Le système jacobin français montre ici ses limites. Il impose une gestion uniforme sur l’ensemble du territoire alors que celui-ci ne forme pas un tout homogène. La solution passe certainement par un fonctionnement bien plus décentralisé des établissements dans lesquels on laisserait une large autonomie financière et managériale aux chefs d’établissements. Cette autonomie pourrait être négociée avec le rectorat et prendre la forme d’un contrat d’objectifs et de moyens.

Mais le problème n’est pas lié qu’à l’institution. Il est plus large et concerne la société toute entière. C’est l’ascenseur social qui ne fonctionne plus correctement. En France aujourd’hui, seuls 5% des classes populaires ont accès aux grandes écoles contre 20% avant la seconde guerre mondiale. Améliorer la situation passe par la réduction des inégalités, par la mise en œuvre d’une réelle mixité sociale, par la suppression des ghettos. C’est tout le tissu social profond qu’il faut renforcer et remanier. Au niveau de l’éducation, nous l’avons vu, le rôle des enseignants doit être revalorisé. La mise en place de classes à effectifs réduits doit être poursuivie. Mais il y un problème de ciblage à résoudre : les établissements type REP/REP+ ne regroupent que 30% des élèves en difficulté. 70% de ces mêmes élèves ne bénéficient donc pas d’infrastructures pourtant mises en place spécifiquement pour eux. Les outils numériques peuvent également faire partie des solutions, en classe comme à l’extérieur. Pour autant, croire qu’ils se substitueraient magiquement aux professeurs seraient une grossière erreur. Enfin, l’approfondissement des partenariats avec le monde de l’entreprise peut également être porteur de solutions. Le sujet est évidemment complexe. Mais il est temps de comprendre qu’il est dans l’intérêt de tous de mieux organiser l’école et de l’orienter vers la réussite du plus grand nombre : si nous ne faisons rien, c’est le pacte républicain qui est mis en danger.

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