Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

Éducation et Citoyenneté

Respectable Loge, La Vraie Lumière, Orient de Nancy, Région 4 Champagne - Ardenne - Alsace - Lorraine et Loges d'Allemagne

Mots Clefs : Socle social

Problématique et méthodologie

La commission s’est réunie afin de réfléchir, dans un premier temps, sur les dimensions de l’éducation et de la citoyenneté, intimement liées entre elles, qui pourraient permettre, dans un second temps, l’élaboration de propositions concrètes pour l’après et la société de demain. Dans ce travail, nous avons essayé de mettre en avant différents points que la crise du covid-19, la période de confinement qui s’en est suivie et celle de retour vers une vie plus normale qui finalise cette situation, ont pu faire naitre dans nos sociétés en prise avec une réflexion sur elles-mêmes et tentant de faire émerger des solutions aux maux qui, s’ils ne sont pas totalement à l’origine de la situation sanitaire, n’y sont pas néanmoins étrangères. Les présentes réflexions se structurent selon 3 axes principaux : l’éducation et son implantation sociale, le processus éducatif et ses objectifs, et, l’indépendance éducative.

État des réflexions

L’éducation ne se conçoit pas comme liée à un lieu, l’école, et comme relative à une période, l’enfance et l’adolescence. L’éducation est l’apprentissage tout-au-long de la vie et dépasse le cadre formel des institutions classiques où elle est censée être prioritairement dispensée. Elle n’est pas mue uniquement par l’école et ses dérivées mais se conçoit dans un système complexe d’alliances éducatives dans lesquelles tous les acteurs de la société doivent intervenir (parents, éducateurs, psychologues, entreprises, …).

L’éducation n’est pas qu’un vecteur de connaissances disciplinaires mais également le ferment de transmission des valeurs républicaines. Indépendamment des origines et des croyances de chacun, l’éducation doit permettre un partage universel de celles-ci. Par ce biais, elle doit permettre le partage et la communication, la compréhension et la tolérance.

L’éducation ne doit pas être un unique apprentissage de connaissances plus ou moins approfondies et nombreuses. Elle doit porter sur des méta-connaissances, des méta-compétences qui dépassent le savoir pour donner des clés permettant de connaitre et apprendre par soi-même sous une forme ou une autre (éducation formelle, informelle ou non-formelle). Elle doit plus consister en un apprendre à apprendre, en un développement de la décentration de soi, en une capacité à prendre du recul, par exemple par rapport à l’hypermédiatisation qui grossit artificiellement des phénomènes et qui en réduit d’autres ne permettant pas la connaissance réelle. 


L’éducation ne doit pas être, comme c’est trop souvent le cas actuellement, régit par un nouveau management vertical qui prend naissance dans des études à large échelle comme PISA qui classent les pays selon des critères de performance mal définis et incitent à une compétition qui sacrifie la diversité internationale mais aussi les différences individuelles en termes d’intérêts, de préférences et de désirs. 


L’éducation ne doit pas à l’inverse créer des disparités entre les êtres mais les aplanir. Il n’y aurait donc pas les « premiers de cordée », possédant tous les outils de la réussite, connaissant les systèmes et sachant les utiliser, et les autres. La fracture numérique, la CSP des parents, la proximité géographique avec les centres intellectuels, sont encore trop des freins à une éducation généralisée et identique pour tous. 


L’éducation ne doit pas être un lieu de marchandisation. Les endroits qui la dispensent ne doivent pas entrer en concurrence mais parvenir à une équivalence éducative. L’entreprise doit être un allié de l’éducation et non un vecteur de consommation sous prétexte de soutien et de support. L’économie ne doit pas dicter les contenus et les moyens de l’éducation, ni devenir le pilleur des élites qu’elle auto-proclame à ses seules finalités et ambitions. 


Le covid a montré la richesse et l’innovation de l’éducation. Beaucoup de projets longtemps laissés au rang des utopies ont vu le jour et se sont concrétisés. Le distanciel a pris la place momentanément au présentiel alors que cela semblait impossible. Loin d’être à considérer comme la panacée, il répond à certaines situations pour certains publics quand l’éducation classique s’adapte mieux à d’autres circonstances. La diversité et la différenciation individuelle doivent donc être au centre de l’éducation qui doit refuser les dogmes du plus grand nombre en s’adaptant à tous les cas particuliers. Elle doit être le moteur de cette transformation pratique lui permettant de rejoindre sa conception philosophique d’éducation pour tous. Elle doit agir par elle-même car l’économie et le profit pourraient lui voler son autonomie en lui imposant les outils d’action qu’ils ont déjà développé dans une optique dénuée des valeurs républicaines et altruistes qui doivent être les siennes. La société de la connaissance vantée et désirée par l’Europe des années 2000 ne doit pas laisser sa place à une société du profit et des inégalités médiatisées par les connaissances. L’éducation doit être sa propre finalité et se suffire à elle-même.

Propositions concrètes et opérationnelles

Pour répondre à ces états de faits, des propositions concrètes et opérationnelles sont présentées par la commission et reprennent l’ordre des constats de la partie précédente.

–  Proposition 1 (court terme, maintenant) : Notre société doit reprendre une réelle connexion avec l’éducation 
qui ne doit plus en être une fraction indépendante mais un organe important au cœur de celle-ci. L’éducation est le ferment de la société et de la vie en son sein. Elle doit permettre, durant toute la vie et à chaque étape de celle-ci, de mettre en avant son interdépendance avec la réalité sociale qui en devient l’acteur privilégié. L’éducation est sociale, la société doit redevenir éducative. 


–  Proposition 2 (court terme, maintenant) : L’interdépendance entre éducation et société se pose comme un postulat reposant sur leur fonctionnement réciproque. L’éducation est le promoteur des valeurs de la société, du respect individuel et des libertés de chacun. La société redonne à l’éducation son rôle de transmetteur de sens des valeurs citoyennes qui placent l’école au centre de son projet social.

–  Proposition 3 (moyen terme, 5 ans) : L’éducation est plus que la somme des contenus disciplinaires sur lesquels elle semble uniquement reposer. Elle doit permettre l’épanouissement et l’émergence d’une méthode individuelle et personnelle permettant à chacun d’avancer dans sa propre vie. Plus que les savoirs, elle doit viser au processus d’acquisition de ceux-ci. Sa finalité s’en trouve changée, dynamique et continue. –  Proposition 4 (moyen terme, 5 ans) : Les libertés individuelles que promeut la société se retrouvent dans les institutions éducatives. Il ne doit pas exister un parcours unique, standard et valorisé. La liberté d’éducation permet tous les cursus et les passerelles. Prenant exemple sur les pays anglo-saxons et mettant au second plan les contenus disciplinaires, la gradation éducative doit remplacer la pure vision verticale et sectaire des filières et des contenus. L’accent est mis sur le processus de connaissances et son perfectionnement plus que sur une certaine exhaustivité apparente et utopique. L’éducation devient alors systémique et non agrégation d’éléments disparates et isolés. –  Proposition 5 (court terme, maintenant) : La prise en compte différentielle des individus et la reconnaissance unanime des parcours divers doit permettre l’épanouissement personnel et non la reproduction des inégalités de départ. La simple reconnaissance et acceptation de ce principe simple doit permettre un changement des valeurs de l’école qui promeuvent le perfectionnement et le cheminement individuels. 


–  Proposition 6 (moyen terme, 5 ans) : L’école, au sens large, est un lieu sacré dans lequel les « marchands du Temple » doivent être bannis. Non seulement, l’éducation ne doit dépendre que de la société mais elle doit refuser la promiscuité des acteurs économiques qui ne visent pas à son processus mais aux gains que ce système de connaissances pourrait lui rapporter. L’éducation est neutre de la sphère économique et marchande, elle est indépendante des valeurs de celle-ci. L’économie éducative est une science descriptive et non un régulateur politique des actions éducatives. 


–  Proposition 7 (moyen terme, 5 ans) : La richesse de l’éducation est le résultat de ses acteurs, enseignants et élèves, qui œuvrent ensemble et cherchent à perfectionner, consciemment ou non, le système dans lequel ils interagissent. Les acteurs externes ne sont pas à négliger, et, les outils et supports qu’ils développent peuvent être utiles. Néanmoins, ils doivent être cantonnés à leur rôle technique, de facilitateur, ou de support à l’enseignement. Les aspects technologiques de l’éducation ne sont pas à négliger mais s’ils ont un effet positif sur le processus central éducatif, ils ne le constituent pas. Le principe éducatif doit revenir au premier plan et les supports éducatifs rester au niveau instrumental qu’ils n’auraient jamais dû quitter. La société de la connaissance repose sur le principe de la connaissance et non uniquement sur l‘expansion des médias de cette connaissance que bien souvent, en plus, ils dénaturent. 
De ces propositions, une idée générale peut être mise en exergue : 


L’éducation doit reprendre la place sociale qu’elle n’aurait jamais dû perdre. Cette position s’entend comme celle de processus central et dynamique animant toutes les sphères de la société en la faisant, enfin, devenir celle de la connaissance pour tous, malgré les différences individuelles, porteuse des valeurs de la république et dénuée de la portée économique qui la dénature et pervertie sa mission.

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