Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

Le numérique au service de l’amélioration de l’école (1ère partie)

Respectable Loge, Intersection, Orient de Paris, Région 12 Paris 2

Mots Clefs : Enseignement à distanceExpérimentationSuivi individuel des élèves et des étudiants

Problématique : maîtriser et bien utiliser les apports du numérique à l’école

    L’ambition d’une continuité pédagogique. La crise sanitaire et le confinement ont placé le système éducatif à tous les niveaux (maternelle, élémentaire, secondaire, supérieur) devant la nécessité de faire face à l’urgence et au caractère inédit de la situation. Elle a révélé la puissance et les potentialités de l’outil numérique, qui ont donné aux acteurs de l’éducation (les enseignants, les élèves, les étudiants, les parents d’élèves) le moyen de faire prendre corps à l’ambition d’une continuité pédagogique.

   Un retard par absence de vision stratégique et opérationnelle. Avec la crise du coronavirus, tous ont été confrontés à une accélération des pratiques et de l’appropriation de l’outil numérique, sans y avoir été bien préparés, ni par leur formation initiale, ni par la formation continue, ni par une animation, ni par un soutien ou un encadrement des meilleures pratiques. Il n’est pas exagéré de dire que la préparation aux usages du numérique, pour les élèves, les étudiants, comme pour leurs professeurs et leurs parents, a été laissée au bon vouloir, aux initiatives et aux parcours individuels de chacun.

   Une nouvelle donne est indispensable. La dimension technologique et numérique conduit à penser à nouveaux frais des questions anciennes qui se posent à l’école, et qui représentent le défi permanent des politiques éducatives comme des actions individuelles des enseignants, des étudiants, des élèves, des parents :

            – les enjeux d’équipement (des enseignants, des étudiants, des élèves, des familles, et de qualité et de capacités des infrastructures réseaux) sont la condition pour rendre possible une continuité pédagogique numérique[1]. C’est aussi la question majeure et ancienne de l’irrigation territoriale de l’école, de l’égal accès au service public de l’éducation en tout point du territoire ;

            – les enjeux d’équilibre entre les différents outils et démarches pédagogiques, notamment entre enseignement présentiel et à distance et, donc, l’articulation entre les rôles respectifs des enseignants et des familles, l’équilibre entre le travail individuel de l’élève ou de l’étudiant et la place des apprentissages en groupe et sous la responsabilité des enseignants.

L’enjeu : une appropriation dans l’urgence, mobilisant les bonnes volontés, mais improvisée et bricolée et renforçant les inégalités, en particulier dans l’enseignement professionnel

   Une mobilisation exceptionnelle des personnels : douze millions d’élèves confinés, une mobilisation exceptionnelle de personnels de l’Éducation nationale au sein des académies, professeurs mais aussi chefs d’établissement, inspecteurs, personnels administratifs, techniciens, personnels de services dont la fonction et l’importance sont parfois oubliées, le tout dans une grande improvisation organisée par le terrain sur le terrain. 

   Cependant quelques voix s’élèvent sur le fait que certains professeurs n’ont pas assuré la continuité pédagogique. On manque de recul et d’informations fiables, au demeurant sans doute variables selon les établissements et les territoires. Dans l’ensemble les professeurs ont été là, et souvent d’un dévouement extrême. Ponctuellement certains ont effectivement pu faire défaut, plutôt beaucoup moins qu’ailleurs. Les professeurs se sont emparés des moyens d’enseignement à distance plus efficacement que si cela avait été prescrit par un plan ministériel ou une volonté politique forte, on peut s’en réjouir.

   Peu voire pas d’impulsion pédagogique et éducative sur le plan national. Cela mérite évidemment un questionnement, une réflexion et de « prendre le taureau par les cornes », c’est-à-dire de construire un chantier nouveau. Concernant le numérique, les professeurs ont à disposition : l’ENT (Espace Numérique de Travail) et de l’outil « classe virtuelle » du CNED (Centre National d’Enseignement à distance). Les élèves disposent par ailleurs de « ma classe à la maison » c’est-à-dire d’activités dispensées par le CNED également, leur permettant de réviser leurs cours. Mais peu d’enseignants ou d’élèves avaient été formés à ces outils, et les infrastructures n’avaient pas été pensées pour supporter un tel volume de connexions. La crise a révélé que nombreux sont les élèves qui ne sont pas équipés des outils indispensables. Les enseignants ont découvert depuis chez eux certaines plateformes numériques avec lesquelles ils n’étaient pas familiarisés, et qui, de plus, ont connu de nombreux dysfonctionnements, même si elles avaient le mérite d’exister.

   La mobilisation générale a, heureusement, dépassé l’éducation nationale. La Poste par exemple, les éditeurs, les entreprises d’outils pédagogiques (EDITECH), les collectivités territoriales, ont apporté un concours précieux.

   De l’innovation frugale, c’est-à-dire l’apprentissage du bricolage, de l’entraide et du travail collaboratif. Des expérimentations multiples, grandeur réelle, de l’utilisation de l’outil numérique et de l’enseignement à distance, ont été conduites, voire improvisées, dans des conditions de bricolage, qui ont nécessité énormément d’heures de préparation. Les enseignants furent confrontés aux limites de leurs compétences, rendant plus que jamais nécessaire un travail collectif pour élaborer leurs projets pédagogiques à l’heure du numérique et à faire appel, souvent, à une aide familiale à la réalisation. Comme dans toute expérimentation, surtout improvisée dans l’urgence, il y a eu des ratés, et aussi de réelles réussites (La maitresse part en Live pour l’école maternelle, Maths et ma team pour les maths en collège, Ton prof en pyjama pour les SVT en lycée).

   De nouvelles relations humaines : Il faut relever aussi une attention inédite portée à la situation individuelle des élèves et des étudiants par les enseignants (conditions scolaires ou universitaires, mais aussi sociales, familiales, d’environnement…), ainsi qu’une relation nouvelle établie entre l’école et les familles : un nouveau regard sur des parents sur leurs enfants et leurs enseignants.

   Une dimension particulière pour l’enseignement professionnel et l’apprentissage : Mais l’on doit s’inquiéter aussi du décrochage de certains élèves, accru pour tous après les vacances de printemps, plus important en lycée professionnel et en apprentissage, où la réalisation concrète joue un rôle important que le numérique n’a pas remplacé.

Pour les enseignants des matières professionnelles, travailler depuis leur domicile est beaucoup moins confortable car ils ne disposent pas des mêmes ressources, ni des outils qui permettent souvent de lever de nombreuses difficultés. De plus, pour ces disciplines, l’élève est seul : il a, en effet, très peu de chances de trouver de l’aide auprès de ses parents, en cas de difficultés. 

   Dans les universités et les autres établissements d’enseignement supérieur, le même effort de continuité pédagogique a été conduit, les mêmes limites et difficultés rencontrées. Outre l’attention renforcée portée à la situation individuelle des étudiants déjà évoquée, deux points méritent d’être relevés :

            – l’importance prise par la réflexion et l’action pédagogiques, dans une culture professionnelle et institutionnelle qui a tendance à surdéterminer les missions de recherche des enseignants-chercheurs ;

            – le rôle d’appui précieux joué, dans les universités qui les ont mis en place, par les services universitaires pédagogiques, pour former et accompagner dans l’urgence les enseignants-chercheurs à l’utilisation des outils numériques comme à l’élaboration de modules de formation à distance.

Proposition phare : [Supra] fiche 165.


[1] Notamment l’accès à distance aux ressources pédagogiques et documentaires (le rôle des bibliothèques universitaires ou des centres de documentation et d’information) et entre les acteurs de l’école. Ceci mobilise, dans des équilibres évolutifs et incertains, les collectivités territoriales et l’Etat.

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