Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

Le jour d’Après

Respectable Loge, Quisqueya l’Amitié Retrouvée, Orient de Port-au-Prince, Région 3 Afrique-Asie-Amériques-Pacifique-Océanie dite le Monde

Mots Clefs : Généralités

La loge « Quisqueya l’Amitié Retrouvée » est une loge haïtienne du Grand Orient de France. A ce titre, l’atelier a décidé de réfléchir aux thématiques proposées sous le prisme du pays et avec la participation des deux obédiences haïtiennes, citées ci-dessus, avec lesquelles le GODF signera bientôt un traité d’alliance. C’est donc l’expression des représentants de plus de 2330 maçons qui est ici exprimée. Le pays d’Haïti, malgré des prévisions catastrophiques annoncées par d’éminents experts, a été relativement épargné à ce jour par la pandémie. Il y a 232 décès pour une population de 12 millions d’habitants. Sur plus d’une vingtaine de pays dans la Caraïbe et les départements Français d’Amérique (DFA), seuls la République Dominicaine, Porto Rico et les DFA (Guadeloupe, Martinique et Guyane) affichent des taux de létalité de 10 à 20 fois supérieurs. On notera que les pays lourdement touchés bénéficient d’une forte influence occidentale. Notre réflexion, au regard des valeurs républicaines que nous défendons : la liberté, l‘égalité, la fraternité et la laïcité, s’est attachée à rester dans une démarche maçonnique.

Le Citoyen, l’État, le monde

Notre regard sur le monde de demain est différent de celui des pays occidentaux. Outre les conséquences résultant de la Covid 19, il est nécessaire d’apporter des réponses de fond au développement du pays. Il est apparu, pour certains, difficile de séparer la réflexion sur l’avenir d’Haïti de la politique. La vision de l’avenir doit aussi prendre en compte le monde dans sa globalité. Les fortes carences du système desantéont été soulignées, elles nécessitent une réforme radicale pour les moderniser. Beaucoup d’interventions ont fait état des bienfaits de la médecine traditionnelle pratiquée par les haïtiens. Il est suggéré que le système éducatif dispense une éducation plus sociale et civique. L’apprentissage doit être fortement développé et valorisé à travers le pays, en particulier pour les métiers manuels. La formation morale et intellectuelle doit commencer dans le milieu familial. L’Education nationale doit être réformée en priorité et en urgence. La justice et le respect des droits humains doivent enfin devenir des valeurs fondamentales. Les citoyens doivent s’appliquer à connaître leurs droits et à accomplir leurs devoirs. La lutte contre la corruption et l’impunité doivent devenir des priorités.

L’État ne doit pas êtreprédateur et cesser ses pratiques vénales. Il doit redistribuer les richesses aux pauvres et prôner la fraternité sociale. L’évolution d’Haïti doit être replacé dans son histoire depuis la révolution de 1804. Les citoyens d’aujourd’hui n’ont rien à voir avec ceux de cette époque. La question raciale a connu de nos jours de grandes avancées. Hélas les haïtiens ne savent pas encore aujourd’hui qui ils sont ? Ils ne sont pas libres et indépendants, par contre, ils sont corrompus.

Le dialogue social tant recherché s’établira difficilement tant que l’inégalité, la misère et la méfiance perdureront. Une réforme en profondeur s’impose pour restituer l’identité haïtienne en recouvrant ses origines à la fois africaine et française, les deux rejetées simultanément à partir de l’occupation américaine (1915 -1934), puis affaiblie par la dictature. Le monde bouge et n’a pas fini d’évoluer. Haïti recule, ayant réduit son passé en un objet politique, tout juste bon à exploiter les passions des masses ramenées à une extrême pauvreté.

L’insécurité reste un problème crucial dans le pays avec la loi des gangs qui s’imposent sur l’ensemble du territoire, affaiblissant terriblement l’autorité de l’Etat.

Il a été souligné l’absurdité de la situation, qui dans le monde, conduit à arrêter les économies à cause d’un virus qui n’entraîne pas une mortalité plus importante que d’autres maladies. Quelles sont les raisons cachées de cette situation qui peut être vont occasionner beaucoup de problèmes bien plus graves ? Le rôle de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) dans ses rapports avec l’industrie pharmaceutique a été questionné. Il existe de plus en plus à l’échelle planétaire un conflit d’intérêt entre les grands groupes pharmaceutiques et l’accès aux médicaments et à la santé pour tous. Le statut actuel de ces grands groupes qui contrôlent la recherche et dont le but principal est « plus de profits à tous prix » doit être révisé, pour trouver un consensus mondial, afin qu’ils soient au service des peuples.  

Pour ce qui est de la coopération internationale, il faut complétement revoir l’approche. On fait du « coupé-collé » sans demander aux haïtiens, ce qu’ils souhaitent ou ce qu’ils ont besoin, sans parler de la corruption internationale. Les haïtiens doivent s’imposer en donnant le ton. La suprématie régionale nord-américaine est fortement remise en cause. L’occupation américaine a laissé un souvenir amer avec l’incompatibilité culturelle et l’ingérence grotesque. Tout aussi consternante l’indifférence de l’ancienne métropole française vis-à-vis de cette République francophone d’Haïti. En ce XXIème les échanges culturelles, économiques et politiques entre les Antilles françaises et la République d’Haïti peuvent légitimement être interrogés. Intéressant aussi de commencer à tirer les premières leçons offertes de la présence prometteuse du Grand Orient de France en terre haïtienne dans le contexte de la Région 01. Ni libre ni indépendant, le pays cherche désespérément les voies d’accès à une communauté internationale qui s’est plu à la maintenir en quarantaine avec une certaine complicité locale. La présente conjoncture, à maints des égards, paradoxalement peut être porteuse d’opportunités à ne pas rater.

L’individu et la société

Haïti doit retrouver les systèmes de solidarité issus de ses racines africaines et vodouisantes qui ont conduit à la conquête de son indépendance. Le vodou n’a jamais persécuté, comme d’autres religions. L’histoire d’Haïti a été dite et faite principalement par les catholiques. Il est nécessaire de refaire surgir nos racines culturelles, de faire tomber les barrières et les différentes sensibilités entre les noirs et les mulâtres. Il faut une réconciliation, un dialogue national. N’oublions pas qu’Haïti a été la première République noire dans le monde, qu’il a ouvert la voie à la lutte pour l’abolition de l’esclavage. C’est le premier territoire qui a fait l’expérience de la liberté, de l’égalité et la fraternité sur le continent américain. Haïti doit faire de cette devise son devoir, pour promouvoir ces principes et pour servir d’exemple. Il faut faire connaître son histoire. Le Grand Maître, du GODF, lors d’un récent Convent, lui a fait honneur en évoquant dans son discours, la cérémonie du Bois Caïman. Il ne faut pas laisser parler les autres à notre place. Il faut reconstruire l’histoire d’Haïti. Qui sommes-nous ? Où allons-nous ? Rappelons que l’histoire d’Haïti est intimement liée à celle de France, occultée pendant deux siècles, réapparue ou « révélée » par le terrible séisme de janvier 2010. Aujourd’hui en pleine conscience français et haïtiens, d’une seule et même voix revendiquent heureusement cette histoire en s’interrogeant sur les motifs de ce silence !

Un nouvel horizon 

Ce terrible virus a perturbé les modes de vie de plusieurs milliards d’êtres humains depuis le début de l’année. Les économies et les méthodes de travail ont dû s’adapter. Dans ce monde où les égoïsmes des puissants dominent, espérons qu’une prise de conscience émergera pour découvrir les valeurs de la vraie solidarité. Pour ne prendre qu’Haïti, sur 12 millions de personnes, plus de 4 millions de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté et 2,5 millions du seuil d’extrême pauvreté. Nous attendons que les dirigeants des pays riches prennent conscience de cette situation de façon efficace et sincère et non pas hypocrite, comme c’est trop souvent le cas aujourd’hui. Il faut préparer le monde de demain et travailler sur la personne humaine et non l’individu. Les valeurs de la Franc-maçonnerie universelle doivent s’affirmer et ouvrir une voie nouvelle. Le chantier est immense. La maçonnerie libérale souhaite partager avec la société haïtienne ses valeurs de fraternité, de mixité, de respect des principes démocratiques, de liberté et de justice sociale

La coopération internationale à l’égard des pays en voie de développement doit évoluer pour accéder à une meilleure répartition des richesses entre les pays riches et les pays pauvres avec un changement profond de méthodologie. Haïti souhaite faire découvrir au monde sa véritable histoire et ses combats pour la liberté et l’abolition de l’esclavage sur notre planète. Le pays souhaite retrouver ses vraies valeurs culturelles issues autant de son africanité que de sa francophonie.

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