Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

La gestion médiatique du coronavirus

Respectable Loge, Demain, Orient de Paris, Région 11 Paris 1

Mots Clefs : Fake-newsPolémiqueRumeurs

   Chaque jour, son lot de nouvelles “infos” les plus farfelus et conspirationnistes ont fleuri sur les réseaux sociaux. Parfois-même, ces rumeurs étaient commentées en plateau dans des émissions de débat, peu scrupuleuses, sur certaines chaînes d’info en continu. Ne croyez pas que ces fausses nouvelles n’aient pénétré que les cerveaux les plus faibles. Au contraire. J’ai été très surpris et parfois attristé de voir des personnes très éduquées, d’un milieu social aisé, multipliant chaque jours les sources d’informations, être les premières à croire aux théories les plus folles.

Problématique : les rumeurs ont marqué cette période.

La multiplication des “fake-news” a eu une première conséquence : jamais les français ne se sont autant tournés vers les médias traditionnels, à commencer par la télévision. Les audiences des journaux de 13h et 20h ont bondi de 40% en moyenne.

Le lundi 21 mars, le journal que je présentais a été vu par 4,9 millions de téléspectateurs. La moyenne habituelle se situe entre 2,5 et 3 millions. Pourquoi un tel engouement pour les grands JT ? Parce qu’en ces temps troublés, qui nous questionnent énormément, les français ont besoin d’une information fiable et aussi de se rassembler. Sur TF1 comme sur France 2, les rumeurs n’ont pas leur place. Seuls les faits comptent.

Mais la particularité de cette crise a été de faire face à plus d’inconnues que de certitudes. Il a donc fallu dire clairement à l’antenne, dès que c’était nécessaire : “nous ne le savons pas pour l’instant”. Ce fut le cas quand il a fallu parler de l’efficacité des tests, de la faisabilité d’un vaccin… etc… Un sentiment très particulier pour le journaliste que je suis. Mais cette sincérité a, selon moi, favorisé la confiance avec nos téléspectateurs. Plus d’humilité face à l’inconnu : voilà l’un des enseignements que nous devons tirer de cette crise sanitaire.

La polémique avant tout.

Trop souvent, les médias ont mis en avant un mot que je trouve détestable : la polémique. En effet, elles n’ont pas manqué : gestion des masques, décisions contradictoires sur les écoles, nombreuses erreurs de communication du gouvernement… Mais si une “polémique” doit être traitée médiatiquement quand elle révèle quelque chose de plus globale sur l’action politique ou les manquements ici ou là de telle ou telle institution, ce n’est en rien une information par principe.

Nous, journalistes, avons trop tendance à sauter sur la moindre petite controverse sans nous demander ce que représentent ceux qui portent la contradiction. Pendant cette crise, plus qu’auparavant, nous avons traité d’abord et avant tout les polémiques en laissant de côté les informations essentielles à la compréhension du monde dans lequel nous vivons.

Dernier exemple, le lundi 18 mai 2020. En fin d’après-midi, la France et l’Allemagne annoncent conjointement un plan de relance européen de 500 milliards d’euros. Pour la première fois, nos voisins allemands acceptaient le principe d’une dette commune européenne. France 2 n’a décidé de n’en faire qu’un simple direct de 50 secondes depuis Bruxelles à 20h20. Les “polémiques” sur le retour des collégiens dans leur salle de classe et celle sur le ramassage des masques usagées qui jonchent nos rues. Je ne dis pas que ces informations ne sont pas importantes, mais elles ne doivent pas occulter les grandes décisions qui marqueront peut-être, les années à venir.

Proposition : l’éducation à l’information

Cette séquence inédite pour nous tous a montré encore un peu plus à quel point la compréhension de l’information était importante. Face aux fausses nouvelles qui se multiplient sur internet, aux manipulations que tentent d’orchestrer de nombreux idéologues, une éducation à l’information me paraît aujourd’hui indispensable. Savoir faire le distinguo entre une information d’une opinion, identifier la source et sa fiabilité, avoir le recul et le questionnement nécessaire sans tomber dans le complotisme de bas étage… tout ceci s’apprend. Ce n’est pas inné, encore plus aujourd’hui face à une multiplication comme jamais du nombre de sources d’information.

Proposition phare

Un enseignement civique élargi dans lequel l’information aurait une place très importante : poser les bonnes questions, permettre à l’élève de se forger sa propre opinion. Les journalistes pourraient aider grandement à cet enseignement qui est déjà traité en début de cursus dans les écoles de journalisme.

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