Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

Épidémie et rationalité

Respectable Loge, Locarno 28, Orient de Paris, Région 13 Paris 3

Mots Clefs : DémocratieHumanismeRaisonSanté publique

Le retour de l’impensé, au travers des craintes du passé.

Nous sommes face à une épidémie semblable à celles du passé, comme celles que nous pensions ne plus avoir à vivre depuis l’invention des antibiotiques et les progrès de la médecine.

La tentation peut être vive de retrouver des réflexes irrationnels anciens. On l’avait vu au moment de l’émergence du sida, où certains évoquaient une punition divine, alors que d’autres se vautraient dans le complotisme, ou refusaient de voir le danger créé par la propagation du virus et de changer leur mode de vie, ou stigmatisaient des populations et des comportements, ou proposaient des remèdes miracle aussi vains que quelquefois dangereux, ou demandaient des restrictions drastiques des libertés.

À une plus grande échelle, parce que le mode de contamination est plus large, on peut voir revenir ce genre de comportements. D’ailleurs, on les voit !

Il semble ainsi que deux dangers guettent aujourd’hui notre manière de comprendre le monde : l’idéalisation d’une « bonne nature » et la « faute ».

Au moment de l’apparition de l’épidémie, beaucoup ont avancé l’idée qu’elle était due au non-respect de la « nature », à une sorte de dérèglement de l’ordre « naturel » des choses.

Pourtant, quoi de plus « naturel » que les épidémies de maladies infectieuses ! Elles ont de tout temps été les compagnes éternelles de l’humanité.

En effet, depuis la révolution néolithique, les brassages des populations, la coexistence avec des animaux offrent aux microbes des réservoirs précieux. Variole, grippe, paludisme sont nés de ces regroupements d’animaux domestiqués et d’individus autour des villages, puis des villes et des circulations sur l’ensemble du globe. La chute de Rome nous dit-on est due en partie aux changements climatiques, mais aussi à cause d’une série de pandémies. La peste apparaît au Ve siècle, et son retour au XIVe siècle fait disparaître entre un tiers et la moitié des habitants de certaines contrée d’Europe. Bien plus tard, les indiens d’Amérique sont décimés par millions en raison du paludisme, de la grippe et de la fièvre jaune. Dans les années 1918-1920, la grippe espagnole fait des ravages, entre 50 et 100 millions de morts ! Plus récemment, le Sida, l’épidémie de SRAS, puis Ebola perpétuent les hécatombes.

Le danger est grand, au travers de cette « dévotion » de la nature, de voir ressurgir des conceptions anti-scientifiques. 

On pourrait ici se référer à Spinoza, dont la célèbre formule « Dieu, c’est-à-dire la nature », a permis de sortir du dogmatisme et des explications magiques par l’étude raisonnée de la nature et a ainsi ouvert la voie aux Lumières ; alors qu’il semble que ces explications inversent la formule en « la nature, c’est-à-dire Dieu », ce qui risque de bloquer la pensée humaine.

L’autre idée qui réapparait est celle de la faute de l’humanité comme cause de l’épidémie.

Il n’y a pas plus de faute par rapport à la nature que de salut ou de rédemption. Le virus n’est pas un « message » à l’égard d’une humanité « fautive ». ll n’y avait pas de paradis avant.

Ces deux écueils trouvent leur source dans une « doxa » aujourd’hui dominante en matière d’environnement, qui attribue les dérèglements de la planète à une attitude fautive de l’humanité à l’égard de la nature.

Pourtant, une écologie scientifique et technique adaptée à notre société moderne peut être élaborée au service de l’humain, avec des solutions qui ne peuvent être que celles de l’intelligence humaine.

Ne quittons pas le rationalisme cartésien : comprendre et maitriser la nature. C’est ainsi que l’on a agi à l’égard des maladies et que l’on doit continuer à faire à l’égard de ce nouveau virus : le comprendre et trouver des tests et des thérapies grâce à la science et à la technique.

Il est donc essentiel de réaffirmer notre attachement à l’esprit des Lumières et aux principes démocratiques : prééminence de la Science et de la Raison, transparence démocratique, responsabilité citoyenne, solidarité citoyenne.

Voilà les principes que nous devons défendre.

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