Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

Citoyenneté

Respectable Loge, Drakkar de la Triple Espérance, Orient de Yvetot, Région 9 Ouest

Mots Clefs : Contrat social

Problématique, Constat

Depuis le XVIIème siècle, le mot citoyen s’entend par « membre d’’une communauté politique organisée » * Si la communauté politique organisée existe par la constitution, le citoyen d’aujourd’hui s’en sent il encore membre ?

Le citoyen ne se définit pas nécessairement par la possession de la nationalité française, mais comme participant à la vie de la cité. Mais il n’a aucun rôle obligatoire à y jouer et il est libre de choisir s’il y participe ou non. Un des rôles essentiels d’une participation active est l’exercice du droit de vote. Force est de constater que le taux de participation s’érode preuve que peu à peu les citoyens se sentent en dehors de la communauté politique. L’une des explications de la montée de l’abstention est selon les sociologues le non-respect, par le Président Sarkozy, du résultat du référendum de 2005 sur la Constitution Européenne. Une deuxième explication possible est la révélation d’une réelle fracture entre les citoyens et leurs hommes politiques : ils leur est  reprochés d’oublier que le peuple doit rester souverain. Enfin, c’est probablement aussi une autre conséquence, comme le signale Jean-Loup BONNAMY expert en philosophie politique, de la fin du clivage politique « droite-gauche », au profit d’une opposition désormais « progressistes-populistes » qui ne satisfait pas tous les citoyens.

La crise actuelle révèle aussi d’une manière criante que le citoyen a disparu derrière le consommateur, consommateur de la société de consommation, mais aussi consommateur des réseaux d’informations. On ne peut que regretter la disparition des intellectuels dans les débats actuels : la plupart des intervenants se présentent en tant qu’« expert », en oubliant le plus souvent les « faits » au profit des impressions. Au niveau de l’Etat, les lobbys continuent de l’emporter au profit de groupes ou d’individualités mais le plus souvent au détriment du service public et du collectif. Il en résulte un recours de plus en plus rapide à la violence lors des manifestations, au communautarisme de différentes natures (professions, loisirs, religion, …). La démarche initiale du nouveau Président Macron, méprisant tous les corps intermédiaires (syndicats, cercles d’opinion, …) pour prendre ses décisions, a conduit au repli sur soi et à la peur de l’autre. Cette tentation nihiliste est un défi pour notre République, a minima dans sa défense de la fraternité et de la laïcité. Si Président, Gouvernement, Députés, Sénateurs etc. ne semblent ne pas en avoir pris la mesure depuis des années, il est rassurant de constater que les maires restent de réels derniers remparts, non sans difficultés parfois.

Parallèlement, la question des libertés publiques remises provisoirement en cause par la pandémie ne semble pas avoir trouvé d’écho sur la majorité de nos concitoyens, pourtant elle est d’une importance capitale si le provisoire devait devenir définitif.  

L’action citoyenne et le lien social qui se créent sont dus non pas à l’Etat dont c’est le devoir mais aux associations type les restos du cœur ou le secours populaire ou les différentes ONG.

Nous avons l’impression que le sentiment d’appartenir à une communauté citoyenne se manifeste dans les compétitions sportives et dans le nouvel opium du peuple qu’est le football.

État des réflexions (non exhaustives)

La civilité, c’est à dire le respect à l’égard de l’autre, quels que soient son sexe, ses origines, ses opinions est-elle respectée ? Les droits et les devoirs de chacun sont-ils respectés ?  Si la démarche de respect à l’égard des femmes a beaucoup progressé dans les mentalités (pas encore pour les féminicides), ce n’est pas le cas pour beaucoup d’autres (LGBT, étrangers, …).

Les règles et les lois sont-elles consciemment perçues ? Nul n’est sensé ignoré les Lois, mais au regard du nombre de Lois votées chaque année, et des dérives dans leur rédaction du fait d’insertions diverses, il est difficile pour le citoyen de s’intéresser à leur contenu et à leur portée. On notera en particulier les difficultés à surmonter lorsque les citoyens veulent contester une Loi (cf la privatisation « ADP » et l’échec du référendum).

L’Etat doit-il continuer de préférer les lois du marché (recherche de profits) aux lois privilégiant dans la durée ses citoyens ? Et, à l’échelle de chacun, le citoyen agit-il pour l’intérêt général ou pour un intérêt particulier (le sien, celui de sa profession, …) ? Ces thèmes posent la question du contrôle du pouvoir exécutif par le pouvoir législatif, voire même par des assemblées de citoyens. En corollaire, les citoyens sont-ils « bien représentés » dans notre démocratie actuelle, « démocratie représentative » toute théorique puisque beaucoup de sensibilités politiques ne sont pas représentées à l’Assemblée Nationale.

Les médias en France sont détenus par quelques grandes sociétés. La recherche de l’information est devenue complexe du fait des fausses informations qui circulent, en particulier sur les réseaux sociaux, mais aussi du fait de la défiance à l’égard de ces médias vus « sous contrôle » de l’Etat et/ou de lobbys. Par ailleurs, on peut constater que nos modes d’échanges évoluent vers les technologies numériques au détriment des rencontres ou tables rondes. Les points de vue s’appuient plus sur l’émotion que sur la réflexion et l’analyse. Sous la pression du temps, nous sommes devenus des consommateurs effrénés d’informations succinctes.

Les libertés publiques ont été remises en cause pendant la pandémie. Liberté d’aller et venir, globalement acceptée par la population, mutualisation des revenus des salariés privés par une prise en charge par l’Etat, mesures réduisant le droit de manifester, de se réunir avec pour conséquence des mesures pénales comme des amendes, non validées par un juge, traçage de la population sur la base d’un volontariat quand même avec l’application Covid 19. Et dans l’indifférence générale sous prétexte d’impossibilité de présence physique, mise en œuvre de la suppression des jurys populaires d’assises. Enfin mis à part les discours, aucune mesure contraignante pour éviter les milliers de licenciements parfois abusifs, ou outrageusement cynique comme l’affaire Alinea.

Propositions (l’utopie où la mort – René Dumont)

Le monde d’Après pourrait simplement s’appuyer sur des concepts nous aidant à nous orienter. Comme le dit Joseph Schovanec en s’inspirant de Socrate, le but serait, non pas « de chercher à vivre mieux en accumulant », mais tout simplement de vouloir vivre meilleur ». L’idéal serait que cela puisse s’appliquer à un plus grand nombre.

Les principaux domaines fondamentaux sur lesquels il faudrait se focaliser et même traiter avec excès seraient, d’abord les besoins primaires de l’être humain (se nourrir, se loger, accéder au travail et à la connaissance). Pour l’Etat régalien, ses priorités seraient la santé ; la sécurité, l’éducation ; la culture ; la justice, l’environnement. Et, pour continuer d’asseoir notre démocratie, il faudrait consolider la liberté d’expression, dont la liberté de la presse, ainsi que la laïcité de l’Etat.

Pour répondre au désengagement des citoyens et leur redonner confiance dans leurs Elus, une réflexion sur l’évolution de notre constitution est nécessaire si nous voulons en gommer son aspect un peu « monarchique » au profit d’une participation plus visible dans la durée des citoyens. Une démarche similaire serait à entreprendre au niveau de la Communauté Européenne : elle ne doit pas être seulement un marché de libre circulation des denrées et marchandises.

Nul ne pouvant prétendre détenir la Vérité, seules des réflexions collectives pourront conduire à résoudre différents travers de notre société actuelle : développer la consommation alors que notre planète n’a que des quantités de ressources finies, baisser les impôts tout en apportant à tous de vrais services publics, améliorer notre appareil judiciaire et son indépendance tout en garantissant une même justice sur notre territoire, informer tout en favorisant les capacités d’analyse et d’ouverture d’esprit, agir en tant qu’européen tout en maintenant une certaine souveraineté française, ….

Deux thèmes nous semblent cependant prioritaires : tout d’abord l’éducation et l’information, et ensuite la cohésion sociale.

Le thème « éducation et information » vise à développer, tout au long de la vie de chaque citoyen, ses propres capacités et ses ressources intellectuelles, en s’appuyant sur les valeurs apprises en particulier dans nos Temples : le travail, l’apprentissage, et les faits.

Concernant la cohésion sociale, c’est toujours quelques années plus tard que nous découvrons les effets des politiques économiques sur l’état de notre société civile, en particulier pour ce qui concerne la détention des richesses et le niveau de pauvreté. Il s’en suit des débats sans fin sur les bienfaits ou les méfaits de ses politiques …. Passées et donc non modifiables !

Concernant les libertés publiques, la pandémie n’a donc fait que confirmer les tendances déjà perçues dans le passé à savoir qu’un événement politique social ou terroriste majeur engendre une réaction du législateur et du gouvernement tendant à aller dans le sens d’une restriction des libertés. Cependant la pandémie a eu un effet inattendu c’est la libération de place de prison en libérant les détenus en préventive (10000), mesure réclamée de longue date par les associations des droits de l’homme. Pour flatter une opinion publique supposée en demande on vote dans l’urgence un texte législatif réduisant les libertés publiques ; par petits pas successifs les libertés publiques perdent leur vigueur.

Et nous Francs-maçons ?

Utilisons la force intellectuelle de nos Loges pour agir dans la société en diffusant plus largement nos réflexions, nos propositions, nos communiqués, nos productions (synthèse des questions à l’étude des loges et de nos planches d’ateliers).

Introduire dans l’examen de la Loi de finances annuelle de l’Etat, en regard des critères économiques habituels (croissance, endettement, …) des critères sociaux (taux de pauvreté, répartition des richesses, …) permettant d’éclairer les élus et les citoyens sur les conséquences sociales immédiates des orientations économiques à voter.

Arrêter de se centrer sur le fonctionnement interne de l’obédience et ne pas perdre de vue l’importance cruciale des droits de la personne y compris la santé qui trouvent tous leur sens lorsqu’ils nous permettent d’y voir clair par temps sombres.

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