Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

Être citoyen dans une société plus solidaire

Respectable Loge, Raison et Laïcité, Orient de Aulnay-sous-Bois, Région 7 Ile de France

Mots Clefs : CitoyenÉducationMoraleResponsabilitéSolidaire

Citoyen ou client ?

Comment améliorer la prise de conscience de la dimension citoyenne de chacun dans une dimension plus globale pour construire une humanité plus juste et plus éclairée ? (Question N°3 du thème L’individu et la société du livre Blanc)

Autrement dit qu’est-ce qu’un citoyen dans une société plus centrée sur l’Humain, dans une société plus solidaire que marchande ?

Pour tenter de répondre à cette question dans le cadre du livre Blanc, nous nous sommes appuyés sur ce qui fonde le GODF, à savoir l’article premier de notre constitution et notamment ce qui en constitue son objet : « la recherche de la vérité, l’étude de la morale et la pratique de la solidarité. »

Ce que nous a appris la crise :

Nous vivons jusqu’à présent dans une société basée sur le profit et la marchandisation. Où l’on consomme de plus en plus pour que le système, axé sur l’Avoir au détriment de l’Être, continue de fonctionner.

Dans ce contexte, chacun se replie sur soi, sur la satisfaction de ses propres désirs au détriment du bien commun. Peu à peu, le citoyen s’est mué en client. Nous produisons de plus en plus et de plus en plus loin des produits de consommation qu’on nous pousse à renouveler et qui ne nous procurent qu’un bien être passager, au détriment des ressources de notre planète, en rompant les équilibres naturels, en augmentant les inégalités, en produisant de plus en plus de déchets…

Le confinement et la situation anxiogène dus à la pandémie ont fait naître et/ou amplifier des attitudes et des réactions nouvelles basées sur la reconnaissance, en particulier celle des soignants qui, quelques semaines avant luttaient dans l’indifférence générale contre la politique d’austérité et de rentabilisation de l’Hôpital Public. Des restaurateurs, des commerçants alimentaires ont mis à disposition des soignants leurs compétences et leurs produits, des régions, des pays ont accueilli des malades, des entreprises ont modifié leur chaîne de production pour les mettre gracieusement au service de la collectivité, des lieux culturels ont mis à disposition des visites virtuelles gratuites, les voisins se sont entraidés, les couturières ont fabriqué des masques, … Toutes ces énergies ont produit un sentiment d’utilité publique tourné vers la bienveillance et la solidarité.

Citoyen : vigie de l’intérêt général

Citoyens d’une Nation, d’un État ou d’un groupement d’États, du Monde… peu importe ! Avant tout citoyens, c’est-à-dire impliqués, conscients des enjeux, partie prenante d’un projet collectif dont les bases ont été définies et acceptées par tous, un projet forgé à l’aune du bien commun.

La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 en son Article 6 qui indique : « La Loi est l’expression de la volonté générale. », n’accorde pas de droits à l’individu mais au citoyen.

Les notions de droit et de liberté sont donc, de par la loi encadrée par des devoirs. C’est la libre acceptation de ces contraintes qui fait de l’homme un citoyen, c’est-à-dire « Un parmi les Autres » : un être singulier qui dépasse ses désirs personnels au profit d’un projet collectif.

Le confinement nous a privés de nos libertés au profit du bien sanitaire collectif. Il nous a délogés de nos habitudes consommatrices, nous a fait percevoir nos besoins essentiels. Il nous a fait retrouver le « goût des autres ». Nous a redonné conscience de l’importance des services publics et de la protection sociale. Nous a fait redécouvrir la nécessité d’un État ; de la valeur du mot Nation…

Ce confinement qui a fait émerger des solidarités, des responsabilités au service des autres, qui a réhabilité les « travailleurs de l’ombre », ne doit cependant pas nous cacher les attitudes individualistes et profiteuses qui ont fleuri ici ou là et nous rappellent que les instincts primaires sont toujours à l’affût.

La notion de citoyen exige l’implication et donc l’information… et donc la formation.

Être citoyen c’est d’abord se sentir appartenir à une communauté, sentir qu’on y est reconnu. C’est aussi s’autoriser le droit et avoir le devoir de donner son avis, d’agir pour soi et pour les autres et d’en avoir le pouvoir. On ne nait pas citoyen, on le devient.

Être citoyen ne consiste pas seulement à mettre un bulletin de vote dans une urne et à s’en remettre à ceux qui seront élus. C’est avant tout être actif, s’informer et accepter la réalité du monde social, économique, sanitaire. Pour ce faire il faut moins de centralisme synonyme de lourdeurs et de contraintes administratives, plus de démocratie directe et de proximité, profitables à la prise de décisions et à l’innovation.

Agir sur les décisions, mais à condition d’être légitime pour le faire. Être légitime, c’est avoir acquis un minimum de connaissances et de disposer d’un esprit critique capable de les mettre en relation pour livrer un jugement éclairé.

Le nouveau citoyen est mentalement agile.

Le nouveau citoyen est aussi un philosophe, il appréhende la nature humaine telle qu’elle est, un passage éphémère de l’homme dans l’espace-temps de l’humanité. Cette perception lui confère un devoir, celui de la transmission. Ce devoir l’oblige notamment à protéger le bien commun des générations à venir, la planète où elles vivront à leur tour. Il doit donc accorder toute sa place à l’écologie et modifier en conséquence ses représentations mentales. Le citoyen doit se doter d’une éthique exigeante pour être une « vigie » de l’intérêt général.

Le nouveau citoyen est organisé.

Le nouveau citoyen se devra d’être plus impliqué dans la vie de la cité notamment à travers les structures décentralisées. Lors d’une crise majeure l’État ne peut rien faire seul. Si son rôle de “chef d’orchestre” est incontournable dans la prise de décision nationale, il doit largement s’appuyer sur les Collectivités Territoriales, les associations et la participation citoyenne pour leur mise en œuvre décentralisée.

Le nouveau citoyen est lucide.

Le nouveau citoyen est ouvert aux transformations du Monde tout en gardant son esprit critique. Il a la perception des bouleversements qui l’attendent dans ses habitudes (télétravail, téléenseignement, robotisation, avancées scientifiques…). Il doit sortir de l’immédiateté subie pour penser en termes de temps long (il doit revisiter l’économie basée seulement sur le profit), en termes de partage (Il doit penser à la protection de la planète), en termes de valorisation des compétences utiles (il doit donner sa place à tous les acteurs de l’ombre promus par la crise).

Le nouveau citoyen est un « citoyen européen »

Le nouveau citoyen doit s’approprier la notion de « Citoyenneté Européenne ». Le projet Européen ne peut pas reposer que sur des règles économiques et monétaires. Il faut à l’Europe un projet global, ambitieux, cohérent qui donne l’espérance d’un avenir meilleur, solidaire, notamment dans les domaines de la santé, des énergies renouvelables, de l’éducation …

Citoyen, au centre du projet

Le nouveau citoyen s’appuie sur la mutualisation des ressources, en particulier en ce qui concerne l’accès aux soins, à la nourriture, au logement, à l’éducation, à la culture, … il favorise la création de structures appropriées à la solidarité, la protection sociale, la fiscalité (voir la notion « d’équivalents de la richesse » définie par Gaudin au Familistère)

Dans ce contexte, il convient de :

  • Replacer le citoyen au centre du projet politique
    • Au sortir de cette crise inédite, nous avons besoin «de civisme, cette ardente obligation qui nous est faite, à nous, les citoyens, de conjuguer nos droits avec nos devoirs. […] d’une République qui enseigne le goût de l’autre. D’une République du respect où l’autorité redeviendrait naturelle, aux antipodes de l’autoritarisme ou du laxisme. […] Il est temps que nous retrouvions le goût de vivre ensemble, la passion de ce qui nous réunit, l’envie de construire un projet commun. »[1]
  • Repenser l’éducation à la citoyenneté
    • La place de l’éducation est fondamentale pour former un citoyen. Cette éducation ne peut pas reposer sur l’individu mais sur une volonté politique de munir l’individu des outils qui feront de lui ce citoyen éclairé.
    • L’éducation qui sclérose les savoirs dans des compartiments trop souvent séparés doit subir une profonde réforme pour établir des liens entre les disciplines, pour que le nouveau citoyen construise une vision du monde qui ne soit pas faite d’une simple juxtaposition de savoirs simplifiés mais de savoirs dynamiques en interactions qui rendent possible l’accès à la complexité du réel. Cette démarche, qui fut le projet des Lumières à travers la rédaction de l’Encyclopédie, visait à rassembler tous les savoirs en vue d’éclairer le citoyen.
    • L’éducation à la citoyenneté ne peut être que globale et s’appuyer sur les synergies de l’ensemble des acteurs éducatifs (famille, école, associations…)
    • L’éducation à la citoyenneté ne se conçoit qu’au travers de mises en situations permettant une implication active de l’apprenant en termes de savoirs, de savoirs faire et de savoirs être (conseil coopératif, pédagogies actives, débat philosophique …)

Les trois piliers du nouveau citoyen :

Éducation du citoyen

Éducation à la citoyenneté tout au long de la vie

Mise en synergie des partenaires (Famille, École, Associations…)

Transversalité des disciplines

Amplification des projets citoyens (service civique, Erasmus…)

Implication autour d’un Projet

Décentralisation des décisions


[1] Jean Glavany in Énergies Laïques N°43 (octobre 2014)

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