Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

Du bien-fondé d’une éthique évolutive

Respectable Loge, Les Trois Globes, Orient de Berlin, Région 4 Champagne - Ardenne - Alsace - Lorraine et Loges d'Allemagne

Mots Clefs : CitoyenÉthiqueHumanitéResponsabilité

Trouver le juste équilibre

Due au coronavirus SARS-Cov2, la crise sanitaire et économique qui a déferlé sur le monde entier dès la fin de l’année 2019, a mis en évidence le peu de cas qu’une partie humanité fait de la nature et a démontré les effets délétères de la mondialisation.

La crise sanitaire a souligné les inégalités sociales et économiques qui « défigurent » notre planète.   Dans un pays comme la France où la pandémie a été tout particulièrement ressentie, touchant les populations les vulnérables, la crise a exacerbé les disparités qui existent entre les classes sociales et entre les générations, les plus de 65 ans ayant payé un lourd tribut à la Covid-19. Chacun de nous aura réagi différemment, mais tous, que nous ayons été directement ou indirectement concernés par la maladie, nous nous sommes interrogés sur notre place dans ce chaos. Homme — être humain — de bien et de mal, il ne nous a pas toujours été facile de savoir comment nous positionner vis-à-vis de l’Autre, comment « bien-agir » pour le bien de tous. Nous avons tâtonné, en butte non seulement aux fausses nouvelles qui accentuent l’angoisse, mais aussi aux incivilités si agaçantes parce qu’elles compliquent singulièrement la vie sociale. Résolus à « vivre quand même », nous avons cherché, sans toujours le trouver, le juste équilibre entre ce qui peut être fait, ce qui doit être fait et ce qui ne peut pas l’être, ce que je veux faire.

L’éthique, une réflexion évolutive

Dans une société qui avait perdu ses repères, le citoyen a été amené à réagir et à agir.

Il l’a fait quand il s’est rendu compte que les politiques, désemparés devant une crise à nulle pareille, mettaient à mal les libertés fondamentales auxquels il est attaché au nom d’un principe de précaution désormais prétexte à toutes les interdictions. Il s’est, à juste raison, étonné de se voir priver de la parole par des savantissimi doctores, medicinæ professores, ajoutant la cacophonie d’une science en débats à son désarroi.

Est-il, dans ce contexte, légitime de remettre en cause les valeurs et les principes qui ont orienté sa vie jusqu’alors ? Nous répondons, sans l’ombre d’une hésitation, par l’affirmative à cette question, mais cette réponse doit être nuancée : les changements, s’il doit y avoir changement, ne peuvent qu’être marginaux. Pourquoi en effet l’éthique qu’un citoyen fait sienne et qui l’a toujours poussée au « bien-agir » devrait-elle être radicalement différente dans l’après-Covid-19 ? Il n’y a aucune raison. L’éthique n’en est pas moins, par principe, une réflexion évolutive. Cette réflexion s’inscrit dans le quotidien. Elle se nourrit de tous les éléments qui viennent interférer dans le cours normal, habituel, de la vie et qui influenceront tout prise de décision devant tenir compte des enjeux éthiques soulevés par une situation particulière. Le philosophe Jacques Derrida a parfaitement posé la problématique de l’éthique dans un entretien pour le quotidien L’Humanité du 28 janvier 2004. « C’est, dit-il, au moment du « je ne sais pas quelle est la bonne règle » que la question éthique se pose. Donc, ce qui m’occupe, c’est ce moment an-éthique de l’éthique, ce moment où je ne sais pas quoi faire, où je n’ai pas de normes disponibles, où je ne dois pas avoir de normes disponibles, mais où il faut agir, assumer mes responsabilités, prendre parti ».

C’est bien (aussi) à ce moment-là que l’Homme et le citoyen se rejoignent dans les dilemmes éthiques que posent une pandémie en général, la pandémie due au SARS-Cov2 en particulier. Ils doivent faire face à des conflits de valeurs qui rendent la décision et, de fait, l’action (plus) difficiles. Avec Derrida encore, acceptons que c’est « l’indécidable » qui mettant à l’épreuve notre capacité à agir selon nos valeurs et nos principes moraux, permet « la décision éthique ».

Orienter son éthique personnelle sans la dénaturer

Le citoyen n’a pas à repenser son éthique personnelle qui est comme modélisée sur sa posture d’Être humain.

Pour agir — et répondre aux impératifs du « bien-agir » —, le citoyen prend, assume, ses responsabilités faisant par exemple du respect de la dignité et de l’altruisme des priorités, d’équité plus que de l’égalité sa philosophie. Il se refuse à tout dogmatisme, privilégie la raison et fort de son expérience, se propose d’accomplir les tâches qui l’ont assigné avec pertinence et en conscience, c’est-à-dire en prenant soin de l’intérêt général.

Face à une situation de crise inédite à l’image de celle que nous vivons, le citoyen peut, doit orienter sa réflexion éthique sans la dénaturer pour lui donner du sens — et non un autre sens —. Une telle situation est pour lui l’occasion d’apporter la preuve ou de se prouver à lui-même qu’il est capable d’envisager la réalité sans compromettre ce qu’il est. Les décisions qu’il prend n’ont qu’une seule limite : elles ne sauraient remettre en question le visage de l’Autre pour le dire comme le philosophe Emmanuel Lévinas (Ethique et infini). « L’accès [à ce] visage est d’emblée éthique », affirme-t-il. Il s’en explique d’ailleurs en précisant : « Autrui est un moi – et en cela il est identique à ce que je suis, puisque je suis un moi – mais il est un moi qui n’est pas moi ».

Face à la crise sanitaire et économique que nous connaissons, le citoyen n’a nul besoin de repenser son éthique personnelle parce qu’elle est fondée sur les valeurs morales et des principes qui le « font » Homme — être humain —. Il peut en revanche réfléchir pour mieux adapter son « bien-agir » aux incertitudes du moment, pour rendre l’impossible possible et

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