Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

L’École : Enjeu républicain

Respectable Loge, L’Amitié, Orient de Saint-Denis de la Réunion, Région 3 Afrique-Asie-Amériques-Pacifique-Océanie dite le Monde

Mots Clefs : ÉcoleSavoir

La Covid a agi à la fois comme révélateur et amplificateur des inégalités qui travaillent notre société. Ces inégalités vont retentir sur l’école, qui, on le sait, est inséparable de la société, tout en s’ajoutant à celles produites par l’institution scolaire, et que de très nombreux travaux ont contribué depuis de nombreuses années à documenter. Mais cette école que nous connaissons, en crise bien avant la Covid, et dont nous sommes les héritiers oublieux, est le réacteur d’un projet politique qui est celui de la République. C’est en regard de ce projet qu’il nous faut aborder la question de l’école et de la formation, qui est son versant complémentaire, dans un monde dont la rationalité, imposée comme sans alternative, et de plus définie comme efficace, vient d’être mise à bas par la Covid. Comment instruire dans le monde d’après alors que sur le plan de l’école nous sommes saturés de discours nostalgiques et, par un effet de symétrie, de discours technocratiques et gestionnaires contents d’eux-mêmes ? Quant tout est devenu flottant (nos identités, nos appartenances, nos rôles) dans une société et un monde devenus incertains, où dominent les intégrismes, comment éduquer pour contrer la figure du destin et combattre les fanatismes ? Comment apprendre à devenir majeur ? Car majeur on ne l’est jamais vraiment, on le devient (Kant).

Qu’est-ce que l’école ?

Notion et sens d’une institution.

Aucune société ne peut se désintéresser de sa propre perpétuation aussi il n’y a donc pas, comme l’a établi Durkheim, de société sans éducation. Education, c’est ce terme venu du latin et qui a une double origine : educare qui veut dire nourrir et élever et educere qui veut dire, tirer hors de, conduire vers. Cette définition nous rappelle qu’aucune éducation ne s’est jamais faite seule et qu’elle a toujours été prise en charge car rien dans l’environnement de l’enfant n’est automatiquement accessible. Qu’il s’agisse de connaissances à acquérir comme de codes et règles à maîtriser. C’est au fil du temps, avec l’évolution et la complexité de la société, que l’éducation va quitter le seul domaine de la famille pour être également confiée à une forme institutionnalisée que l’on va appeler école. L’idée essentielle de cette invention tient à la nécessité d’offrir à l’enfant un lieu, où délivré des contraintes du moment, il peut, par l’effort consenti, transformer ses potentialités en facultés. A cette école, la société va lui assigner, selon le projet politique qu’elle porte et développe, des fonctions précises par rapport à des populations déterminées, comme l’établit magistralement la situation de La Réunion, colonie servile jusqu’en 1848, colonie sans esclave jusqu’en 1946 et aujourd’hui région européenne ultrapériphérique. Approcher autrement la question de l’école c’est prendre le risque de se perdre. C’est donc une certaine idée de l’homme qui habite la conception du rôle de l’école et de grands penseurs (Aristote, Comenius, Rousseau, Condorcet…) ont su donner à l’idéal scolaire sa place et son rôle dans une philosophie générale de l’émancipation.

École et République

Au principe de ce projet d’émancipation qu’incarne La République des pères fondateurs (Condorcet, Jules Ferry et d’autres) il y a l’école qui la fonde où l’élève, le futur citoyen, le futur travailleur s’accomplissent ensemble. il est vain de proclamer la liberté des individus sans les libérer de l’ignorance,  la pire des servitudes selon Condorcet. Comme il est vain de proclamer que les individus sont égaux si la puissance publique ne leur permet pas de jouir des bénéfices d’une instruction aussi étendue que leur autorisent leurs capacités. République et école ont donc partie liée. Depuis son origine l’école républicaine se fait un devoir de former des hommes instruits et des citoyens éclairés.

Au temps de Jules Ferry, l’enjeu républicain de l’école c’est la République elle-même et plus tard avec Jean Zay c’est celui de la démocratisation du savoir et de la culture. Aujourd’hui, dans une société qui ne s’enseigne plus mais où tout est mis en œuvre pour fabriquer une élite hyperspécialisée et mobile, et une masse de consommateurs  assignés à des lieux  et à leurs appartenance socio-raciales,  l’enjeu républicain de l’école demeure  plus que jamais d’actualité avec  La République à reconquérir et l’école à réinstituer.

L’École, l’État des Savoirs et des Débats

 Enjeu majeur de l’action politique l’école occupe une place importante dans les débats publics. Du côté du monde profane, une foultitude de manifestations, de multiples ouvrages, spécialisés ou de synthèse, et un nombre incalculable de revues, généralistes ou thématiques, dans des approches attendues ou renouvelées, mobilisant des cohortes d’acteurs de statuts et d’ancrages divers nourrissent ces débats qui peuvent emprunter à peu près à tous les champs disciplinaires, en se plaçant à différentes échelles . Dans ce vaste panorama, pour la connaissance du système scolaire, de son organisation, de son évolution et de ses transformations il y a notamment tous les travaux d’Antoine Prost (1968, 1992, 2012, 2013) et ceux de Jean-Michel Chapoulie (1989, 1995, 2005, 2006, 2010). Et si nos préoccupations portent sur les conditions mêmes de l’Education dans un monde où tout ce qui servait de socle à l’institution scolaire est en voie de disparaitre il y a tous les travaux de Marie-Claude Blais, Marcel Gauchet et de Dominique Ottavi  (2008, 2013, 2014), ceux  d’Henri Pena-Ruiz (1994, 1999, 2008, 2014), et aussi ceux de Charles Coutel(1991, 1996, 1999, 2001). Du côté du GODF, il y a notamment tous les travaux des Journées Jean Zay.

Propositions concrètes

1) Rendre l’Ecole plus juste en établissant une égalité des droits au service de la réussite de tous les élèves. Continuer à prôner l’égalité des chances, en raison du niveau des inégalités qui fracturent notre société, relève du cynisme absolu.

2) Re-scolariser l’école en lui donnant les moyens d’assurer ses missions fondamentales : instruire les enfants, dispenser une culture commune, former à une autonomie de pensée.     

3) Ajouter penser à la trilogie célèbre lire, écrire et compter, et ce dès l’école primaire.

4) Revoir la formation pratique des enseignants, qui doivent disposer d’un droit à l’expérimentation, et celle des personnels d’encadrement, dont les services doivent comprendre un volume d’heures d’enseignement hebdomadaire.   

5) S’attaquer aux difficultés scolaires en renforçant l’éducation comme service public, et, pour ce faire,  en s’appropriant  les connaissances produites par différentes catégories d’acteurs ( chercheurs, mouvements pédagogiques, groupes de réflexion, acteurs de terrain…).Concrètement  un corps de répétiteurs pourrait être, par exemple, rétabli pour mieux aider les élèves de l’école publique  à faire face aux exigences de leur scolarité (travail, préparation aux examens, concours) et assurer une continuité pédagogique,  afin de ne pas laisser ces divers besoins  pris en charge par le secteur marchand . Autre mesure concrète le dispositif Ouvrir l’école aux parents pour la réussite de leurs enfants (OEPRE) devrait être étendu à l’ensemble des parents et pas uniquement à ceux de la migration.

6) Réinstaurer l’Education populaire en établissant un grand ministère de l’Education Nationale et de l’Education populaire.

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