Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

Redonner du sens à la solidarité

Respectable Loge, Étienne Dolet, Orient de Orléans, Région 5 Centre

Mots Clefs : AideSolidaritéVivre ensemble

Qu’entend-on par solidarité ?

La pandémie due au coronavirus s’est traduite par une crise sanitaire doublée d’un désastre économique et social comme il ne s’en était pas produit depuis un siècle. Une fois encore, les plus démunis ont été durement touchés en priorité. Leur survie – le terme n’est pas trop fort – nécessite une aide de la part de tous ceux qui en ont la possibilité. Qu’est-ce à dire ? Pour essayer d’apporter des réponses à cette question un rappel de la notion de solidarité n’est peut-être pas inutile avant d’analyser ses manifestations au cours de la crise et de proposer des actions concrètes.

La solidarité est l’un des principes fondamentaux du Grand Orient de France et la doctrine morale de la franc-Maçonnerie. Léon Bourgeois l’a décrite comme une « théorie d’ensemble des droits et des devoirs de l’homme dans la société ». Il a précisé qu’une « république démocratique, c’est un État social fondé sur la liberté de chacun et la solidarité de tous ». Il est utile, à ce sujet, de distinguer « solidarité » et « charité ». Cette dernière, surtout pratiquée dans les religions permet aux donateurs de se libérer la conscience, alors que la solidarité va bien au-delà : elle a une acception plus large, concrète et humaine. Ainsi la Franc-Maçonnerie y consacre-t-elle une place essentielle : dans toutes ses Loges, un « Hospitalier » veille, avec tous les membres de l’Atelier sur les plus fragiles et les plus faibles.

Comment la crise a-t-elle frappé les diverses couches sociales au point de nécessiter une aide indispensable pour maintenir les plus vulnérables à un niveau décent ?

La solidarité au cours du confinement

Le confinement s’est traduit par la fermeture de toutes les structures rassemblant des personnes : entreprises, commerces, artisanat, lieux de culture et de sport… De nombreux salariés au service de ces différentes activités ont été placés en chômage partiel. Certes, ils ont été rétribués, souvent un peu moins que de coutume, mais parallèlement n’ont pas supporté les dépenses inhérentes à leurs déplacements quotidiens par exemple. Ils ne sont sans doute pas les plus défavorisés. En revanche, pour de nombreuses entreprises le bilan financier de ces trois mois d’inactivité professionnelle a été terriblement dégradé, voire totalement nul alors que des dépenses se sont accumulées. Bien sûr quelques dirigeants ont mis au point des méthodes nouvelles : tel restaurateur est devenu traiteur et a livré ses préparations, telle industrie textile s’est transformée en unité de fabrication de masques en tissu… mais il est de nombreux domaines où ni le télétravail ni l’adaptation à une activité différente n’ont été possibles. C’est le cas du BTP par exemple.

Dans ce contexte, des entreprises – un peu fragiles – ne connaîtront pas un retour à « la vie d’avant ». Il faut donc s’attendre à une recrudescence très significative du chômage. Les personnes privées d’emploi seront contraintes de freiner leur consommation, ce qui entraînera de nouvelles fermetures d’entreprises et donc des chômeurs en plus grand nombre. Comme toujours dans ces phases douloureuses, les plus défavorisés en font les frais.

La solidarité s’impose par conséquent, et son acceptation par la société doit être claire, volontaire, revalorisée, relégitimée.

On a vu apparaître, à l’occasion d cette crise, de nouvelles formes de solidarités interprofessionnelles, ou interindividuelles. Des personnes se sont entendues pour organiser le ravitaillement des gens isolés, âgés ou précaires. Des habitants bienveillants ont pris régulièrement des nouvelles de leurs voisins de quartier. Nombreux sont ceux qui ont distribué des produits de leur jardin aux plus touchés par la crise. Les personnels soignants ont reçu de forts témoignages de sympathie, et des soutiens concrets (repas apportés par des associations, des restaurateurs…) pour leur travail exemplaire. La générosité n’a pas manqué de se révéler dans ces diverses actions.

À l’inverse, hélas, des manifestations d’égoïsme et d’individualisme ont aussi pu être constatées. Certains par exemple n’ont pas hésité à partir dans des régions de villégiature pour échapper aux contraintes du confinement quitte à propager le virus dans des endroits mal équipés en services hospitaliers. D’autres ont bravé toutes les consignes de prudence en se regroupant dans les rues ou au bord de l’eau dans le seul but de « faire la fête » au risque de contaminer tout leur entourage.

La solidarité n’a donc pas disparu en ces temps difficiles, mais elle a su s’adapter dans ses manifestations qui se sont révélées parfois insuffisantes ou maladroites. À l’inverse, des tendances individualistes et égoïstes fortes se sont exprimées. Nous devons donc promouvoir le principe de solidarité dans notre République, laïque et sociale.

Proposition de mesures concrètes

Si l’on admet que la solidarité familiale existe de manière naturelle, les autres formes de solidarité pourraient probablement être mieux valorisées.

Il semble d’abord essentiel que l’école, via l’instruction civique adressée au futur citoyen, redonne à ce principe une place importante. Apprendre au quotidien le vivre ensemble, le savoir-être, le respect et l’écoute de l’autre, le partage et l’entraide constituent le fondement de la vie en société. Ces valeurs pourraient s’acquérir en commençant chaque matin, à l’école, par une réflexion sur une petite phrase bien choisie, ou une petite histoire du quotidien mise en scène dans laquelle les élèves seraient amenés à penser et à s’exprimer sur les valeurs incontournables du vivre ensemble dans de bonnes conditions. C’est ce qui s’appelait autrefois la « leçon de morale ». C’est en effet en grande partie à l’école que revient la tâche de semer ces graines qui pourront fructifier plus tard et qui seront le terreau de l’engagement futur.

Plus difficile est d’entretenir ensuite chez l’adulte les notions acquises à l’école au cours de l’enfance ! Peut-être pourrait-on imaginer utiliser les moyens modernes de communication auxquels sont sensibles les populations : diffusion de messages via les réseaux sociaux sous forme de publicités, de films, de scénettes ou de sketches dans lesquels seraient promues certaines valeurs indispensables à la vie en communauté et à « l’amélioration morale, intellectuelle et sociale de l’humanité ». Il y a eu la France apprenante. Il pourrait y avoir aussi la France solidaire.

La solidarité, participation de toute la société au soutien des plus démunis, n’est en rien une atteinte à la liberté de chacun. Elle est une démarche destinée à apporter une aide, selon ses possibilités, à ceux qui n’ont pas d’autres solutions pour conserver une once de dignité. Pour redonner du sens à la solidarité il paraît nécessaire de valoriser et de rendre plus visible ses acteurs. Avec l’Instance Nationale de Solidarité Maçonnique et la Fondation du Grand Orient de France, les Francs-Maçons ont ouvert la voie. Celle-ci pourrait fort bien être suivie par le monde profane.

– Instauration de « minutes de solidarité » dans l’enseignement des jeunes enfants à l’école.

– Conception réalisation, diffusion de vidéo promouvant les actions solidaires en France.

– Reconnaissance des actions solidaires par un dispositif de valorisation : une médaille de la solidarité ou une ouverture de la médaille du mérite aux actions solidaires remarquables.

A lire aussi

De quoi sommes-nous riches ?

Chaque Franc-Maçon travaille individuellement à l’édification de son temple intérieur mais aussi collectivement à la construction d’un monde meilleur et plus éclairé en portant à l’extérieur du temple les vérités acquises ! Ces travaux propres...

Lire la suite
De quoi sommes nous riches ?

Comment préparer et commencer à gérer dès à présent les crises à venir ?

Problématique : la logique court-terme conduit à l’inconscience et à une dette envers le futur. Les crises récentes, en particulier la crise sanitaire du Covid 19, démontrent clairement le manque de contrôle et de cohésion,...

Lire la suite
Le citoyen, l'état, le monde

Qu’avons-nous appris de cette crise ?

La France a reconnu, il y a presque deux ans, la valeur constitutionnelle du principe de fraternité, le troisième de la devise républicaine avec la liberté et l’égalité. Nous avons ainsi accueilli l’idée que la...

Lire la suite
Un nouvel Horizon