Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

La Science et la Technique

Respectable Loge, Bartholdi Liberté, Orient de Clermont-Ferrand, Région 6 Est et Loges de Suisse

Mots Clefs : DéontologieFinancement de la rechercheFormation scientifiqueNégationnisme scientifique

La science et la Technique à l’épreuve du Coronavirus

La crise a montré l’importance de la parole scientifique qui a permis l’acceptation du confinement et l’engagement désintéressé de ses acteurs. Elle a prouvé l’importance de certains métiers techniques (santé, informatique, et autres activités permettant le fonctionnement quotidien de la société) parfois invisibles et sous-estimés. Mais le contexte d’urgence a mis en lumière des failles connues mais sciemment ignorées par les politiques des S&T. L’image de la science a été mise à mal par des controverses publiques aggravées par la parole politique, des manquements à la rigueur et à la déontologie de recherche. La volonté de minimiser les stocks (masques, respirateurs), l’avarice de moyens alloués à la recherche et à la technique (CHUs, soignants) mettent en cause la politique de gestion des S&T dont la gestion marchande a conduit au pire bilan épidémique dans les 3 pays les plus ultralibéraux (USA, Brésil, Royaume Uni).

La pandémie, ajoutée au changement climatique, a fait prendre conscience de l’importance de la nature tant négativement (surexploitation  transmission de virus de la faune sauvage) que positivement (chute de la quantité de polluants durant le confinement). Ces risques avaient antérieurement fait l’objet d’alertes par les scientifiques, sans qu’elles ne soient prises en compte par les politiques.

Faiblesse de la culture et de l’enseignement scientifique

Juste avant la pandémie (22-II-2020), le colloque du GODF « Reconquérir la culture scientifique : un enjeu humaniste » traçait déjà les grand enjeux du manque de culture scientifique de la population: soupçons de complotisme, succès de la pensée « magique », manque de confiance dans la parole scientifique sur des sujets particuliers[i], malgré une confiance globale en la science[ii]. Ce qui rabaisse la valeur du savoir validé de la science au niveau d’une simple opinion basée sur le « bon sens » commun.  

Un sondageii montre que les Français accordent leur confiance aux études si elles sont portées par les scientifiques eux-mêmes, et diffusées en libre accès.

Les enquêtes comparatives entre pays (PISA) [iii] et internes à l’éducation nationale[iv] rapportent un mauvais niveau des élèves français en mathématiques et sciencesqui révèle un sous-développement de la culture scientifique de la population.

Mesures à prendre

Par essence, la recherche fondamentale doit explorer l’inconnu pour lui-même, et non pour résoudre un problème pratique donné. Les laboratoires de recherche perdent leur temps à trouver des financements, notamment privés. Il est vital que la recherche fondamentale soit publique, totalement indépendante (sans ingérence du privé ni lobbying), en la dotant d’un financement uniquement public, fortement accru.Ceci doit permettre de revaloriser les salaires afin de contrôler la fuite des cerveaux,de multiplier les programmes non-ciblés et offrir davantage de moyens aux jeunes scientifiques prenant des risques sur des sujets ambitieux. Leur mobilité entre laboratoires devrait être aidée. Il est nécessaire de financer des centres de recherche de très haut niveau, répartis sur toute l’Europe pour en partager la charge, de favoriser les coopérations interdisciplinaires, sources d’avancées majeures, et une coopération internationale libre dont l’absence actuelle affaiblit gravement l’effort de recherche sur la pandémie. Créer un groupe international d’experts sur la santé à l’image du GIEC pour le climat, mais qui aurait les moyens financiers pour orienter certains secteurs de recherche.

Il manque une coordination nationale, voire Européenne, pour assurer que tous les domaines fondamentaux soient couverts pour alimenter la recherche appliquée. Des organismes combinant la recherche fondamentale et appliquée, à l’image de l’INRAE en agriculture, devraient être créés pour soutenir les secteurs économiquement clefs, mais en restant à l’abri du lobbying. Il est nécessaire de réintégrer la recherche dans les entreprises, notamment par l’extension des thèses CIFFRE et de l’attribution du Crédit Impôt Recherche sous condition et contrôle d’une utilisation exclusive pour la recherche.

S’agissant des publications scientifiques, l’intégralité des résultats des études doit être mise en libre accès après 6 mois d’exclusivité du groupe d’édition, dont les bases de données seraient obligatoirement remises à un organisme international pérenne en cas de cessation d’activité. Déontologiquement, la validation de tout manuscrit par un comité de lecture expert est indispensable avant publication, les controverses scientifiques ne doivent se faire qu’entre experts, et les communications aux média n’intervenir qu’après acceptation de la publication scientifique.

Pour redresser la perception de la science, il faut formerles enfants à l’esprit critique dès le début du primaire par des activités de décodage des infox, de la publicité mensongère, des rumeurs la prise de conscience de la nécessité de vérifier les sources ; il faut parallèlement corriger le déficit de formation scientifique des instituteursiv, réintroduire la mathématisation des sciences en début du secondaire et revenir à un enseignement fort des maths. Renforcer le recours à la science participativei associant des citoyens (souvent des jeunes) et des laboratoires de recherche, qui initient à la démarche scientifique, permet des collectes massives de données et débouche sur des découvertes majeures. Dans les médias, des experts reconnus devraient être conviés à tout débat touchant à une question scientifique. Enfin, pour leur permettre de transmettre et de légiférer valablement, une formation en sciences, respectivement des journalistes et des politiques, s’impose. Au niveau des responsables politiques coupables de mesures prises à l’encontre de la santé ou de la vie de la population en dépit du consensus scientifique admis, il faut que le négationnisme scientifique soit reconnu comme un crime contre l’humanité. Dans un premier temps, l’écocide doit enfin être criminalisé, au moins au plan national et Européen.

Mesures clefs

  • Nécessité d’une recherche fondamentale publique, totalement indépendante, doté d’un financement uniquement public et important. Prévenir la fuite des cerveaux par des salaires décents et en donnant des moyens aux jeunes chercheurs qui prennent des risques.
  • Nécessité d’une coopération internationale libre des chercheurs.
  • Répartir et financer des centres de recherche de très haut niveau dans toute l’Europe.
  • Pour toute recherche, publication de l’intégralité des résultats en libre-accès, uniquement dans des revues à comité de lecture expert. Pas de communication aux médias avant acceptation de l’article dans un journal scientifique.
  • Réintégrer la recherche appliquée dans l’entreprise, notamment en conditionnant l’attribution du Crédit Impôt Recherche à sa réelle utilisation pour la recherche.
  • Enseignement : formation à l’esprit critique dès le primaire, corriger le déficit de formation scientifique des enseignants du primaire et renforcer la mathématisation des sciences pour les élèves du secondaire.
  • Favoriser la recherche participative associant des citoyens et des laboratoires de recherche,
  • Formation scientifique des journalistes et des politiques, présence d’experts à tout débat scientifique dans les médias.
  • Négationnisme scientifique : reconnaitre comme crime contre l’humanité les décisions des dirigeants politiques prises à l’encontre du consensus scientifique et ayant porté atteinte à la santé ou la vie dans une population. Adoption d’un crime d’écocide au plan national et européen.

Remarque générale

Les nombreuses failles auxquelles veulent remédier les présentes propositions sont la conséquence d’une politique déshumanisée, imprégnée de néolibéralisme, qui privilégie les résultats financiers à court terme et s’avère incompatible avec notre démarche humaniste.


[i] Sondage Ipsos https://www.ipsos.com/sites/default/files/files-fr-fr/doc_associe/les-francais-et-les-sciences-participatives.pdf

[ii] Sondage Harris https://harris-interactive.fr/wp-content/uploads/sites/6/2019/12/Rapport-Harris-La-confiance-des-Francais-dans-la-science-et-la-politique-Pergamon.pdf

[iii] Ministère de l’Education Nationale, https://www.education.gouv.fr/pisa-2018-culture-mathematique-culture-scientifique-et-vie-de-l-eleve-6209    

[iv] Le Monde, https://www.lemonde.fr/education/article/2020/10/01/le-niveau-des-eleves-francais-en-mathematiques-continue-de-baisser_6054427_1473685.html

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