Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

État d’urgence, privation de libertés. La démocratie dans la crise sanitaire mondiale.

Respectable Loge, Les Amis des Hommes, Orient de Lyon, Région 6 Est et Loges de Suisse

Mots Clefs : État d’urgencePrivation de libertés

Cette question se rapproche de la question posée par le livre blanc du GODF et qui est la suivante : « une situation de crise dans une société démocratique justifie-t-elle une restriction des libertés ? ».

Notre exposé vous est présenté en 3 points :

Des décisions légalement conformes à notre Constitution………. même lorsqu’elles ne le sont pas !

Une nécessaire humilité face à notre méconnaissance de ce virus et de sa dynamique

Une nécessaire information, indépendante et vérifiée.

Le 1er point abordé au cours de ce temps de travail a concerné la légitimité du processus qui a abouti à la décision du confinement et à la restriction des libertés individuelles qui en a découlé.

En 2017, M. Emmanuel Macron a été élu président de la République. La Constitution précise qu’il nomme le 1er ministre qui a pour mission première de constituer un gouvernement.

« Conformément à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement peut demander au Parlement, pour l’exécution de son programme et sur une durée limitée, l’autorisation de prendre des mesures qui sont du domaine de la loi. Les ordonnances de l’article 38 de la Constitution sont des actes réglementaires jusqu’à leur ratification par le législateur et peuvent donc être contestées devant le juge administratif ».

Que ce gouvernement ait gouverné et gouverne, par ordonnances en cette période de crise, n’est donc que l’aboutissement logique du processus constitutionnel.

Même s’il faut le signaler, l’adoption du projet de loi organique relatif à la situation sanitaire, le 18 mars 2020, s’est faite …….en ne respectant pas l’article 46 de la constitution. En effet, cet article stipule que :

« Les lois auxquelles la Constitution confère le caractère de lois organiques sont votées et modifiées dans les conditions suivantes :

Le projet ou la proposition ne peut, en première lecture, être soumis à la délibération et au vote des assemblées qu’à l’expiration des délais fixés au troisième alinéa de l’article 42. Toutefois, si la procédure accélérée a été engagée dans les conditions prévues à l’article 45, le projet ou la proposition ne peut être soumis à la délibération de la première assemblée saisie avant l’expiration d’un délai de quinze jours après son dépôt ».

Le conseil constitutionnel, saisi de cette question le 23 mars, a estimé que « compte tenu des circonstances particulières de l’espèce, il n’y a pas lieu de juger que cette loi organique a été adoptée en violation des règles de procédure prévues à l’article 46 de la Constitution ». Le fond plutôt que la forme !

Venons-en maintenant à la question de la proportionnalité entre décisions gouvernementales et restriction des libertés individuelles qui nous sont imposées depuis plusieurs mois.

Les statistiques, (et les participants à cette question restent attentifs à tous les biais qui peuvent accompagner le calcul de ces statistiques trop souvent perçues ou présentées comme vérités absolues) montrent bien que le taux de mortalité des moins de 65 ans (qui représentent 80% de la population), rapporté à la totalité de l’effectif des moins de 65 ans dans notre pays, semble « conforme » aux années précédentes. La surmortalité n’est constatée que pour les + de 65 ans. Autrement dit, pourquoi imposer à tout un pays un confinement qui risquent d’aboutir à des conséquences sociales très marquées (chômage de masse, ménages basculant dans la précarité, fermetures d’entreprises, dégradation de l’état sanitaire des personnes en attente de soin, etc.) alors que le risque de mortalité pour les moins de 65 ans semble statistiquement très faible.

Pour au moins deux raisons :

Parce qu’identifier les chaînes de contamination reste un processus hautement aléatoire et que donc la liberté souhaitée par les uns peut avoir une action délétère sur la santé des autres alors que ces derniers auront pris, pourtant, de nombreuses précautions ;

Parce que la liberté des uns, certes quelque peu entamée, pourrait conduire beaucoup d’ « autres » à l’hôpital alors que nous savons tous que les capacités hospitalières ont été laminées par de nombreux gouvernements qui n’ont vu dans celui-ci qu’une « entreprise » comme les autres, devant être soumise à la loi du marché. L’état de notre hôpital public n’est pas à la hauteur de ce qu’il devrait être.

Pour autant, la vigilance par rapport à la dégradation de nos libertés individuelles doit rester de mise.

Deux exemples de cette nécessaire vigilance sont révélateurs. Le 1er concerne les vives critiques qui ont accompagné la transmission des données médicales et environnementales par l’organisme public français « Health data hub » vers des centres de stockage des données, gérés par une filiale irlandaise de la société américaine microsoft.

Dans ce dossier, « pour la CNIL, la situation est donc très claire : les données des citoyens européens ne peuvent plus être confiées à une entreprise américaine, même si celle-ci dispose d’un siège et de serveurs dans l’Union européenne. « Cette situation doit conduire à modifier les conditions d’hébergement de la Plateforme des Données de Santé ainsi que celles des autres entrepôts de données de santé qui sont hébergés par des sociétés soumises au droit étatsunien ». Le gendarme soutient que ce changement d’hébergement « devrait intervenir dans un délai aussi bref que possible »

https://droit.developpez.com/actu/309820/Le-Conseil-d-Etat-autorise-Microsoft-a-heberger-les-donnees-de-sante-des-Francais-malgre-l-invalidation-de-l-accord-Privacy-Shield-et-les-recommandations-de-la-CNIL/

Et pourtant, pourtant……la Cour de Justice de l’Union européenne, « n’a pas, à ce jour, jugé que le droit européen de la protection des données interdirait de confier le traitement de données, sur le territoire de l’Union européenne, à une société américaine. En outre, une violation du règlement général sur la protection des données (RGPD) demeure dans un tel cas hypothétique, car elle supposerait que Microsoft ne soit pas en mesure de s’opposer à une éventuelle demande des autorités américaines. Les données de santé sont, par ailleurs, pseudonymisées avant leur hébergement et leur traitement par la Plateforme. Enfin, il existe un intérêt public important à permettre la poursuite de l’utilisation des données de santé pour les besoins de l’épidémie de covid-19 grâce aux moyens techniques dont dispose la Plateforme.

En conséquence, le juge des référés du Conseil d’Etat ne relève pas d’illégalité grave et manifeste qui justifierait la suspension immédiate du traitement des données par cette plateforme ».

https://droit.developpez.com/actu/309820/Le-Conseil-d-Etat-autorise-Microsoft-a-heberger-les-donnees-de-sante-des-Francais-malgre-l-invalidation-de-l-accord-Privacy-Shield-et-les-recommandations-de-la-CNIL/

2e exemple qui doit pousser à l’extrême vigilance citoyenne.

Il s’agit de l’épisode du site gouvernemental de lutte contre les fakenews. A partir du 23 mars, « s’alarmant du nombre démesuré de fakenews qui peuvent mettre en danger la santé des français », le service d’information du gouvernement (SIG) a alimenté un site internet en puisant, sans leur demander leur accord, dans les sites de différents journaux dédiés à la vérification des informations circulant sur la toile. Selon le journal « le Monde », mis à contribution forcée, « l’initiative n’est pas du goût des rédactions concernées qui découvrent qu’elles participent [à leur insu] à une rubrique intitulée « s’informer sur la désinformation » créée par un service qui dépend de Matignon. Il faut ajouter que seuls certains journaux nationaux étaient référencés. Aucun titre de la presse régionale, ni aucun article du Parisien, Figaro, des Echos, ou encore de médias en ligne comme Médiapart ne sont cités.

Alors que la porte-parole du gouvernement avait déclaré que ce site serait fermé dès la fin de l’état d’urgence sanitaire, la page a été close mardi 5 mai. 32 sociétés de journalistes et de rédacteurs ont « [dénoncé] un mélange délétère des genres ». Le SNJ national avait déposé un référé -liberté pour atteinte à la liberté de la presse. 

Ce dernier exemple nous conduit au 3e point, celui de la nécessité d’une information fiable, avérée, mise à disposition de tous les citoyens.

Une pleine démocratie ne peut être exercée que par des personnes bien informées. Ce n’est qu’avec un haut niveau d’informations avérées qu’une question peut être débattue depuis les premières interrogations jusqu’à ses conséquences les plus difficiles à imaginer. Et une presse indépendante, exigeante dans la fiabilité de ces sources, exigeante envers la qualité des informations qu’elle produit est également au centre de la question démocratique. Disposer des informations pour évaluer la situation et prendre la bonne décision est une absolue nécessité. Ce fameux 4e pouvoir est pourtant lui aussi mis à mal si l’on veut bien se reporter au nom des propriétaires des groupes de presse détenteurs de la majeure partie des titres d’information. Autrement dit, point de libertés individuelles sans informations avérées. Savoirs plutôt que croyances, faits croisés et éclairés plutôt que simples opinions. C’est à ces conditions que nos libertés individuelles pourront continuer à s’exercer.

A lire aussi

S’opposer à un état d’exception permanent

Récurrence des épisodes d’état d’urgence en France Depuis les attentats de 2015, la France a vécu des épisodes répétés d’état d’urgence. Récurrence inquiétante car elle engage le régime d’état de droit vers un « état d’exception »...

Lire la suite
Démocratie