Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

Le monde d’après

Respectable Loge, La Sagesse, Orient de Valence, Région 6 Est et Loges de Suisse

Mots Clefs : Ensemble

La crise bouleverse les références les plus essentielles d’un système, les choix collectifs fondamentaux des acteurs concernés. Cette appréciation porte en elle la réflexion qui doit être menée sur les réponses à apporter à la crise.

Un virus a fait son apparition sur le territoire national qui a submergé notre système de soin, créant la sidération parmi la population malgré des barrières, patiemment construites. Il est indispensable de posséder des plans et des organismes pour faciliter leurs mises en applications, néanmoins la véritable révolution dans le monde de la gestion de crise sera intellectuelle. C’est celle qui poussera les décideurs à raisonner sur le scénario du pire, celui dont l’occurrence est très faible, mais dont les conséquences sont incalculables. Cette révolution doit être menée à tous les niveaux. En ce qui concerne l’hôpital, il faut un engagement fort, clair et inébranlable de la direction pour préparer cette résilience. Se contenter de nommer des référents, peu formés, souvent sans réels moyens ni feuille de route, des cellules de crise dimensionnées pour activer des plans blancs bien calibrés, ne suffiront probablement pas à faire face à la crise majeure. Le personnel de l’hôpital, qui travaille « border line » au quotidien, qui donne sans compter, et qui fait face avec courage aux difficultés journalières, ne doit pas confondre ce bruit de fond avec une situation de crise majeure. Il est de la responsabilité des managers d’être convaincus de la menace et des risques qui pèsent sur nos sociétés d’aujourd’hui. L’objectif de ce travail, n’est pas de présenter des solutions clés en main, mais plutôt de donner des pistes de réflexion et de travail, pour que l’hôpital reste ce maillon essentiel, qu’il a toujours été dans notre histoire. Enfin, il s’agit bien de donner les moyens aux personnels de ces établissements de soins de gagner la bataille.

Il s’agit de traduire ce travail en mode opératoires.

La crise sanitaire du nouveau coronavirus se révèle exceptionnelle à plus d’un titre. Planétaire, elle touche un grand nombre de personnes et peut engendrer un grand nombre de victimes. Elle donne lieu à une restriction des libertés publiques qu’on n’avait pas connue depuis de nombreuses décennies. Les règles édictées par le gouvernement et notamment les mesures de restriction de liberté pour endiguer la progression de la pandémie sont globalement respectées.

La crise sanitaire donne lieu à un sentiment de cohésion et d’appartenance à un collectif qui nous dépasse. Elle nous fait prendre conscience d’une certaine fragilité du monde. Fragilité de la croissance effrénée, des acquis en matière de bien-être matériel et même de confort, des épargnes, de la sécurité sanitaire. C’est le premier enseignement que nous retiendrons de la présente crise.

Cette prise de conscience de la fragilité du monde devrait aussi contribuer à mieux faire accepter l’idée, chez ceux qui n’en seraient pas encore convaincus, que l’écologie planétaire est, elle aussi, fragile et qu’il faut prendre au sérieux les menaces qui pèsent sur notre terre. Le scepticisme et même la négation au sujet des questions écologiques vont sans nul doute régresser dans le contexte de l’après-crise sanitaire.

La crise actuelle montre qu’il est possible d’affronter une grande menace en déployant d’imposants moyens à notre disposition.

On redécouvre l’importance de l’État lorsqu’il fait preuve de leadership dans une situation de crise. C’est un second enseignement qui s’imposera.

Les épidémies des siècles passés avaient accentué la méfiance envers autrui, considéré comme un danger potentiel. De nos jours, malgré des cas isolés de méfiance envers certaines populations, c’est plutôt la solidarité et plusieurs messages d’espoir qui dominent. L’une des grandes nouveautés dans cette crise est que, pour la première fois dans l’Histoire de l’humanité, s’exprime une volonté de ne laisser personne sur le côté. Le principe darwinien qui veut que, par souci d’efficacité, on soigne avant tout ceux qu’on a le plus de chances de sauver en laissant de côté les plus faibles n’est pas le principe qui prévaut dans la réponse sanitaire apportée. On essaie, autant que faire se peut, de soigner tout le monde, tous ceux qui ont besoin de l’être. Il n’y a pas d’exemple de ce genre par le passé. Une ligne de fracture est néanmoins apparue à l’occasion de cette épidémie : la fracture générationnelle. Une fracture entre les personnes âgées et les jeunes s’est clairement manifestée. De nombreux jeunes ont remis en cause la gravité de l’épidémie ou ne se sont pas vraiment sentis concernés. De fait, les victimes de la maladie se comptent essentiellement dans les catégories de population les plus âgées. La menace, pour les jeunes, est donc moins inquiétante.

Avec l’allongement de la durée de la vie, les préoccupations des jeunes et des plus âgés sont de plus en plus éloignées. Cette fracture générationnelle est quelque chose qu’on a sous-estimé jusqu’ici et qui jouera un rôle de plus en plus important à l’avenir.

Une autre nouveauté est qu’on assiste à un bouleversement de l’échelle des valeurs. On s’aperçoit que des professions jusqu’ici peu considérées et peu rémunérées s’avèrent essentielles en cette période de crise. C’est le cas de tous les métiers de la chaîne logistique, des caissières de supermarchés, des chauffeurs-livreurs. Nous découvrons que leur rôle est essentiel au bon fonctionnement de la société. On peut imaginer que la question de l’utilité de leur travail et du travail en général sera posée après cette crise. Va-t-on décider de revaloriser ces professions jusqu’ici déconsidérées ? Il est possible, en tous cas, que la question du travail soit réévaluée à l’aune de la place qu’il attribue à chacun dans la société et que soit remise en question la philosophie qui prévalait jusqu’ici et qui ne voit dans le travail qu’un coût.

La solidarité familiale et communautaire et la préoccupation pour la santé et le bien-être de tous devraient ressortir renforcées une fois la crise passée.

Une autre chose qui va cependant changer, c’est notre regard sur la mondialisation et la redécouverte du local, de la proximité, de la région, de la nation. La crise sanitaire est largement tributaire de la mondialisation. Le virus est entré d’abord porté par des voyageurs avant de se diffuser par des interactions communautaires.

On découvre aussi notre dépendance collective devant les productions de biens nécessaires au bien-être (médicaments génériques, matériel de toute sorte, etc.), trop largement délocalisées pour des raisons de coûts dans les pays à faibles salaires. C’est la face noire de la mondialisation dont nous avons jusqu’ici profité avec l’arrivée de biens courants moins chers. Notre regard sur la mondialisation sera désormais plus nuancé. L’ouverture vers les autres pays et les échanges internationaux resteront, mais nous allons aussi revoir les manières de faire et mieux prendre conscience des enjeux oubliés ou négligés de la mondialisation tous azimuts des dernières décennies. La crise sanitaire mondiale va rappeler aux nations l’importance de conserver une emprise sur leur propre destinée.

Cette crise pose également le problème philosophique du « Comment vivre ensemble ? » et également celui du « penser individuellement et agir collectivement ». Cette crise inédite liée à l’épidémie de coronavirus générera-t-elle ou accompagnera-t-elle des changements sociaux ou sociétaux ? L’histoire montre que les grands bouleversements coïncident souvent avec ce type d’événements. Mais il est difficile de percevoir les incidences que pourraient avoir cet épisode sur notre avenir proche ou plus lointain. Il est probable qu’il y aura, après cette crise, au sein de la société française, deux tendances, la tendance marquée par la volonté de tirer les leçons de ce qui s’est passé et la tendance à un retour à la normale. Et tout cela dans un contexte de crise économique dont on ne connaît pas encore l’ampleur. Qu’en résultera-t-il ? A ce stade, on ne peut que poser les paramètres de l’équation et qu’espérer que la FM puisse participer à cette résolution.

A lire aussi

Le prix de la santé

Le constat : « une mascarade » La problématique de départ est issue du travail réel. Loin de l’événement festif haut en couleurs, la mascarade dont je parle, est plutôt un simulacre effrayant. Le gouvernement nous a assuré...

Lire la suite
Le citoyen, l'état, le monde

Santé et solidarité

Constat et évolutions suite au COVID Un triste état des lieux pour la politique de santé au lendemain de la 1ère crise aiguë La gestion de la crise du COVID a montré combien les hôpitaux...

Lire la suite
Le citoyen, l'état, le monde