Pourquoi et comment prendre son temps

Introduction

Le Temps, composante des lois de notre Univers et de nos existences nous inscrit dans une dynamique où nous naissons, vivons et mourrons.

Sans avoir besoin d’évoquer les découvertes relativistes d’Einstein, il est évident pour chacun d’entre nous que le temps est une question de perception et de contexte. Ainsi, le temps médiatique n’est pas le même que le temps judiciaire.

Il a pourtant tendance à s’accélérer pour tous depuis quelques décennies avec l’avènement des télécommunications, des avions supersoniques et autres merveilles de la technologie. Il continue cependant d’échapper tout à fait à notre contrôle.

Mais alors, pourquoi diable l’Homme devrait-il donc prendre son temps si ce dernier n’a de cesse de lui échapper ? N’est-il pas paradoxal de s’interroger sur la façon de prendre son temps alors même que la condition humaine est fatalement connue ?

L’objectif de la prise de temps

Bien que le Bonheur soit différent pour chacun d’entre nous, c’est sa quête qui nous inspire principalement pour avancer du Présent vers l’Avenir. Afin de pouvoir vivre et s’adapter à son environnement, les actions humaines dépendaient autrefois pleinement du rythme naturel: semer en automne pour récolter en été, chercher du bois pour se chauffer au début de l’hiver, pêcher dans les lacs à la fin du printemps… La vie de l’Homme était rythmée par ces usages naturels, il a su y trouver son équilibre à la fois pour sa subsistance mais aussi pour son épanouissement.

Pourtant, l’Homme moderne n’a manifestement plus le temps. Il faut aller vite : dans ses relations, dans sa vie professionnelle, dans ses loisirs. A l’instar des médias, journaux télévisés, réseaux « sociaux », il faut faire le buzz. L’immédiateté est semble-t-il devenue une vertu. Malheureusement, cette course permanente à la gratification immédiate et ce règne de l’instantané peuvent avoir de terribles conséquences sur nos démocraties.

Prendre son temps serait une forme de rébellion contre un monde pressé d’en terminer avec Lui-même.

Réserver son jugement pour commencer par prendre en compte la complexité de la réalité, aller chercher la contradiction, etc. sont devenus des luxes. Faire preuve d’esprit critique et se forger une opinion au-delà d’une recherche Google requièrent du temps et du courage.

La prise de recul n’est plus simplement l’apanage du citoyen responsable mais le fondement d’un héroïsme moderne.

Les Moyens

Les Francs-maçons ont bien compris que les sociétés modernes manquaient justement par-dessus tout de ce temps long dans lequel peut se développer une réflexion complexe enrichie par l’étude des symboles, le débat contradictoire et la sagesse collective.

Pour suivre notre propre chemin initiatique, un moyen : la pratique de rites via un vecteur de déploiement : le rituel. Ces rites ne sont d’ailleurs pas l’apanage de la franc-maçonnerie. Jadis, l’expression faire son temps était synonyme de faire son service militaire. Ce temps était ritualisé avec sa séquence et sa dimension initiatique par la remise de signes distinctifs de la population civile, la pratique d’une gestuelle particulière et le sens du collectif. Il est d’ailleurs particulièrement intéressant de constater que dans nos temps si éclatés et distendus le service militaire ait disparu puisqu’on ne prend plus notre temps.

Pourtant, point de réalisation sans fondation résultant de notre introspection. Pour ce faire, une seule solution : suspendre le temps et travailler de midi à minuit sans nous soucier de l’écoulement du sablier.

Une loge n’a pas de temps ; seulement un espace. C’est pourquoi, nous sommes convaincus qu’un maçon en loge a comme objectif de s’approprier d’abord l’espace sur lequel il planifiera ensuite l’édification de son temple intérieur.

Conclusion

Pour tenter d’y parvenir, tout un chacun dispose de son libre arbitre pour ralentir l’écoulement du temps en prenant le temps de vivre et en suivant une voie initiatique qu’il pourra réaliser par la pratique de rituels maçonniques ou profanes. Cette pratique inaugurée par l’initiation ne connaîtra pas de fin puisqu’il s’agit bien d’un processus continu jusqu’à l’Orient Éternel

Le maillet qui résonne au fil de la tenue n’est autre qu’un métronome qui bat la mesure de ce temps long auquel s’astreignent les frères qui savent qu’il faut s’enfermer (en loge) pour retrouver sa liberté et s’inscrire dans une Chaîne d’Union qui tend du passé vers l’avenir.