Sceau GODF
Mariane
Livre blanc

Le Covid 19, une épreuve initiatique

Respectable Loge, Étoile de Marianne, Orient de Niort, Région 9 Ouest

Mots Clefs : Initiatique

« Nous traversons le présent les yeux bandés. Tout au plus pouvons-nous pressentir et deviner ce que nous sommes en train de vivre. Plus tard seulement, quand est dénoué le bandeau et que nous examinons le passé, nous nous rendons compte de ce que nous avons vécu et nous en comprenons le sens. »  Milan Kundera

Jamais cette citation de Kundera n’a pris sens à ce point. Depuis le début de cette épidémie de Covid 19, nous avons perdu tous nos repères. La méconnaissance du virus ainsi que le caractère inédit des mesures mises en œuvre nous empêchent de nous projeter ne serait-ce qu’au lendemain. Confinés, nous sommes contraints de vivre l’instant présent.

Tous les gourous du développement personnel nous répètent que pour bien vivre, il est impératif de vivre l’instant présent. Or notre mode de vie occidental et notre besoin de réassurance nous engage à prévoir l’avenir et toujours anticiper nos lendemains. Nous en arrivons à ne plus profiter du moment présent dans l’espoir d’hypothétiques jours meilleurs. En ce sens, le confinement a été une expérience enrichissante. Après tout, pour une grande majorité d’entre nous, nous n’avons manqué de rien, si ce n’est de la liberté de circulation.

Pendant 8 semaines, le temps a suspendu son vol, nous donnant de ce fait l’occasion d’observer notre environnement, d’être plus attentif à l’autre, d’entrer dans une attitude méditative. Ceci me laisse penser que ce dont nous avons été privés, nous enrichit. De même qu’un aveugle, compense le déficit du sens perdu par une hypertrophie de l’ouïe et du toucher, j’ai le sentiment qu’à défaut de pouvoir évoluer à ma guise dans l’espace géographique, l’espace-temps a pris une toute autre dimension. Aussi, je ne saurai définir mon rapport au temps durant cet épisode. Il m’a paru à la fois très long dans le déroulement d’une journée et très court sur la période. Ce focus sur l’espace-temps me laisse perplexe. Alors que notre quotidien est orchestré par la pendule et l’agenda, et que nous n’envisageons les choses que d’un point de vue scientifique et donc irréfutable, le temps, cette entité universellement quantifiable s’avère à géométrie variable. En effet le temps vécu en conscience est plus long que le temps passé en activités diverses et variées.

Lorsque Milan Kundéra dit que « nous traversons le présent les yeux bandés », je perçois ce propos comme un constat d’inconscience. Parce que nous ne prenons pas le temps de vivre l’instant présent en conscience, nous passons à travers ce qui nous entoure, sans même nous en rendre compte, sans même le voir.

Cette première interprétation est à affiner au regard de la suite du propos « Plus tard seulement, quand est dénoué le bandeau et que nous examinons le passé, nous nous rendons compte de ce que nous avons vécu et nous en comprenons le sens. »

Devons-nous comprendre que nous avons des œillères, si tel est le cas quelles sont-elles ? celles de l’ignorance ou celle du refus de clairvoyance ? Peut-être devons-nous comprendre que pour percevoir le moment présent il nous faut le recul de l’expérience, il nous faut acquérir la connaissance. Que nous ayons des œillères cela tombe sous le sens. Nous sommes formatés par notre éducation et notre vécu et ce conditionnement nous amène à appréhender l’inconnu au travers de notre référentiel. Ces « scripts », ces raccourcis nous permettent de gérer le quotidien et ses aléas au travers de routines. Au moindre problème rencontré, nous avons une solution prête à l’emploi.

Dans le cas présent du Covid 19, la fulgurance du virus, la mondialisation de l’épidémie et la gestion en temps réel et flux tendus de l’information ont donné un caractère inédit au phénomène. Alors que la technologie est toute puissante et que les progrès de la science nous laissent envisager la quasi-immortalité de l’Homme, nous ne pouvons pas admettre que l’humanité soit mise en danger par un virus venu de nulle part. Il tombait sous le sens que les scientifiques, les experts du monde médical détenaient la solution. Que nenni, nous avons assisté à une bataille d’experts tous aussi désemparés les uns que les autres. Une chose est sûre, il nous faudra des années avant de connaître les tenants et aboutissants de ce virus, avant de trouver le moyen de l’éradiquer.

A mon sens, conscience et connaissance sont les vertus nécessaires à la traversée de cette épreuve. En tout état de cause, cette citation de Milan KUNDERA prend une résonance toute particulière dans cet espace-temps et dans nos Temples puisqu’il fait écho à l’Initiation et son bandeau, à la Franc-Maçonnerie qui se veut initiatique et dont le sens ne se révèle que progressivement. De là à dire que l’épisode que nous vivons est en soi initiatique, il n’y a qu’un pas, un pas glissé de Maçon, bien entendu.

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